samedi, 23 janvier 2021
Un démon qui souriait aux anges -2-
Le malheureux cabaretier n'en finit pas de mourir ce qui rend sa femme folle de rage d' autant plus que les plaintes se font entendre jusque dans l'estaminet provoquant la curiosité des clients. Non, décidément, il faut en finir !
Aussi, un soir après la fermeture du troquet, elle décide de passer à l'action ; elle enfila des chaussons afin de ne pas faire craquer le vieil escalier, s'arma d'un couperet de cuisine et grimpa jusqu'à la chambre. Le malheureux somnolait. D'un coup bref mais violent, elle le décapita. Puis ayant traîné le cadavre sur le sol, elle s'employa à le découper en morceaux. Le corps fut sectionné en treize morceaux qu'elle enfourna dans un saloir, puis elle jeta le reste du cadavre dans la fosse d'aisance. On était le 28 octobre 1816.
Dans les jours qui suivirent cet affreux drame, elle sut garder une mine radieuse devant les clients qui commençaient à s'inquiéter de l'absence du patron.
— Il a dû se rendre à Nantes pour régler des affaires litigieuses. Je pense qu'il ne tardera pas à revenir. Il me manque tellement !
Les semaines passèrent. Elle inventait toutes sortes de mensonges pour expliquer cette absence prolongée (il est tombé malade sur place, il est venu en coup-de-vent cette nuit, mais a été obligé de repartir précipitamment).
Le cabaret ne désemplissait pas, bien au contraire. Profitant de la soi-disante "absence" du patron, les clients tentaient leur chance auprès de la Marie-Donatienne qui était aux anges. Elle alla même jusqu'à ouvrir une salle de bal dans la pièce même où elle avait trucidé son mari !
Cependant, des effluves nauséabondes commencèrent bientôt à envahir les lieux. Rappelez-vous que les morceaux du corps sont dans le saloir !
Des voisins incommodés par cette odeur de putréfaction décidèrent alors de prévenir les gendarmes. Ils arrivèrent trop tard car la veille au soir, se doutant d'une visite de leur part, Marie-Donatienne avait fait un trou dans le jardin pour y ensevelir les restes du corps. Elle fut quand même arrêtée et ne tarda pas à avouer son crime.
Elle fut présentée à la Cour d'assises le 16 juin 1817.et fut condamnée à mort. L'exécution eut lieu deux mois plus tard, le 16 août 1817. Avant de mourir, elle tint à lire à haute voix au public une lettre qu'elle avait rédigée quelques jours auparavant :
Vous tous Chrétiens qui êtes ici présents pour voir la fin de ma pénible vie, au moment où je vais paraître devant le Tribunal du Souverain Juge, je confesse hautement que je suis coupable du grand crime pour lequel j'ai été condamnée au dernier supplice ;je demande pardon humblement à Dieu et aux hommes du scandale que mon crime a causé. Je vous prie de me pardonner et de prier Dieu pour mon âme.
En me voyant, plaignez mon sort, car je déclare encore que c'est le libertinage de ma vie qui m'a conduite à tous mes excès. Je désire que mon supplice serve de leçon à la jeunesse pour la détourner de la licence. J'offre mon supplice à Dieu pour satisfaire son éternelle justice et j'attends mon pardon de son infinie miséricorde. Mon Rédempteur, priez pour moi, que Dieu me fasse pardon et miséricorde Je vous demande à tous un Pater et un Ave dans ce moment !
Le couperet de la guillotine tomba lourdement sur sa tête qui roula dans le panier.
À la date du 16 août 1817 on peut lire dans le registre des décès de la ville de Tours :
FIN
Cette histoire est tirée du livre : Brigands et sorciers, de Gérard Boutet.
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17:40 Publié dans Enigmes | Lien permanent | Commentaires (0)
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