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mardi, 01 décembre 2009

435. Célestine Chardon -11-

                            LA VIE BIEN ORDINAIRE DE CÉLESTINE CHARDON

Chapitre 11 : les débuts d’une nouvelle vie

podcast
Le lendemain Célestine téléphona dans la matinée à la section locale des restos du cœur, l'association fondée en 1985 pour venir en aide aux plus démunis. Au départ cette association s'était fixée un but de relais en attendant que la situation sociale de la France s'améliore. Mais voilà, on était en 2002, et les restos étaient toujours là.

Jusqu'à présent Célestine n'avait jamais prêté une attention particulière aux œuvres caritatives, estimant que c'était à l'état à subvenir aux besoins de tous, après tout, on payait suffisamment d'impôts comme ça ! Mais cette fois-ci, elle s'était bien rendu compte que les restos rendaient d'immenses services et puis elle avait envie de se sentir utile à quelque chose, utile à quelqu'un, cela lui donnait des raisons supplémentaires pour poursuivre une existence qui jusque là avait été bien triste.

Elle aimait à dire qu'elle entamait sa troisième vie. Après tout les chats ont sept vies, pourquoi il en serait différent pour les humains ?

Sa première vie avait été son enfance, entourée des siens, ses souvenirs de petite fille aimée et heureuse. Puis elle était entrée dans le monde du travail, le monde des adultes, c'était sa deuxième vie remplie de désillusions, une quête du grand amour qui s'étiola au fur et à mesure que les années passaient, un monde où elle finit par devenir une mécanique bien huilée qui fit ce qu'on lui demandait sans jamais se poser de questions. Il valait d'ailleurs mieux de ne pas s'en poser de trop, des questions, car la déprime peut mener parfois à des gestes irréversibles...Elle avait tenté par deux fois l'expérience, loupées par chance. Elle passa ainsi de nombreuses années sous une sorte d'éteignoir.

On aurait pu penser que la petite flamme qui était cachée dessous avait fini par s'éteindre. Mais non, elle attendait l'instant où elle serait délivrée pour briller de nouveau, pour étinceler dans la nuit et revivre pleinement. C'est ce qui était en train de se produire depuis deux jours...Le couvercle de l'éteignoir s'était légèrement soulevé et la petite flamme, au contact de l'oxygène se remit à brûler ! Et cette fois-ci Célestine, avec la maturité de réflexion qu’amène les années, était bien décidée à vivre pleinement, sans contrainte, sans tabou aucun, à aller jusqu’au bout de toutes les expériences, tenter les pires folies. Elle n’avait de comptes à rendre à personne.

Pour l’instant elle contactait la responsable des restos qui fut enchantée de récupérer une nouvelle bénévole au moment où les vacances arrivaient.

— Vous pouvez passer au local cet après-midi si vous voulez. J’y serai et je vous ferai visiter les lieux.

Ce local était situé dans la rue Febvotte. Quand on passe devant, on est toujours surpris de voir une longue file d'attente sur le trottoir, une file qui s'allonge de plus en plus à mesure que les années passent.

— Bon, voilà une bonne chose de faite ! se dit-elle en raccrochant le combiné. Maintenant, au tour de la banque.

Et elle s'en fut voir son banquier préféré. Elle n'était pas riche, mais elle avait hérité de ses parents d'un petit pécule qu'elle avait placé, puis, étant peu dépensière, elle avait réussi à mettre de côté une rondelette somme d'argent. Et elle avait dispersé ses placements dans plusieurs banques, histoire de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier.

Elle se pointa à la banque dès l'ouverture afin de pouvoir rencontrer le responsable aussitôt. C'était un homme de son âge qui partageait avec elle l'amour des félins. A chaque fois qu'ils se voyaient, ils se donnaient des nouvelles de leur chat.

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L'entretien s'éternisa donc un peu et il était déjà onze heures quand elle quitta les locaux de la banque située boulevard Heurteloup. Elle coupa en biais derrière l'hôtel de ville et se retrouva bientôt rue Nationale. 

Les lauriers roses étaient en fleurs et il faisait un superbe temps...Elle s'engouffra dans la Galerie Nationale et emprunta l'escalator qui menait à la FNAC. Arrivée au rayon informatique, elle demanda à voir un conseiller. Il lui fallut attendre un certain temps car il y avait pas mal de monde et tous les employés étaient occupés. Un jeune arriva enfin :

— Voilà, lui dit-elle, je veux m'acheter un ordinateur, quelque chose de bien, le prix importe peu. C'est pour mon usage personnel, donc je n'ai pas besoin de choses compliquées. Et ne vous lancez pas dans des explications techniques car je n'y comprends rien ! Je vous fais entièrement confiance, ne me décevez pas !

 Le jeune employé ne put s'empêcher de sourire. Il aurait pu lui fourguer les articles en promotion qui étaient déjà « out » mais il la trouva si sympathique qu'il lui proposa un modèle d'un bon rapport qualité-prix. Et comme elle avait la carte du magasin, elle bénéficiait d'une remise de 5% sur le prix d'achat, ce qui ma foi n'était pas négligeable. Par contre elle devait revenir avec sa voiture pour récupérer le matériel. Elle se dit qu'elle passerait au retour des restos.

Elle rentra toute guillerette chez elle. Au passage elle croisa Lucie qui rentrait déjeuner.

— Ah Lucie ! Je vais avoir besoin de toi. Figure-toi que je viens de m'acheter un ordinateur. Mais tu vas devoir m'aider à l'installer.

Voyant la mine amusée de Lucie, elle s’empressa de rajouter :

— Oui, je sais, j’ai toujours dit que je trouvais ça inutile, mais que veux-tu, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’idée, non ?

— Mais non, Célie, je ne me moque pas de toi, je suis très contente au contraire. Tu vas voir, c’est génial. Et puis, te connaissant, curieuse comme tu es, tu n’as pas fini de découvrir plein de choses !

— Bon, parfait. Ah, je commence à être sur les nerfs… Tiens, au fait, as-tu mangé ?

— Non,  j’y allais ; pourquoi ?

— Eh bien on va fêter l’évènement ; je t’emmène grignoter un truc quelque part, allez, suis-moi !

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Et les voilà parties, bras dessus, bras dessous, Lucie commençant à vanter à son amie tous les avantages de l’internet. Elles finirent par entrer dans la crêperie de la place Plumereau.

L'après midi Célestine se rendit rue Febvotte en voiture. Le local des restos était fermé mais la responsable s'y trouvait ainsi que quelques bénévoles, occupés à ranger les denrées alimentaires. Elle fut accueillie chaleureusement et sentit tout de suite que l'ambiance y était fraternelle, sans chichi et qu'elle s'y plairait. Elle sentait ces choses d'instinct sans pouvoir l'expliquer clairement. 

Elle se rendit ensuite au service après-vente de la FNAC pour récupérer son bien. Ce n'est pas sans difficulté qu'elle parvint à gravir les trois étages qui la séparait de son appartement. Une fois chez elle, elle réfléchit à l'endroit où elle pouvait installer l'ordinateur. Il fallait que le téléphone soit à côté, donc son choix se porta tout naturellement dans son salon-bureau, petite pièce qui lui servait aussi de chambre d'ami avec son canapé clic-clac.

La prise du téléphone était située dans l'angle près de la fenêtre. L'endroit lui parut parfait car ainsi elle pourrait jeter un coup d'œil de temps en temps par la fenêtre pour voir ce qui se passait dans la rue.

Elle repoussa un peu le canapé de façon à libérer de la place et s'en fut dans sa cave à la recherche d'une table. La cave de Célestine pouvait prétendre au titre de caverne d'Ali Baba... Elle eut d'ailleurs bien du mal à se frayer un chemin parmi tous les meubles entassés et dénicha enfin ce qu'elle cherchait: une table en bois, rectangulaire et dont les pieds étaient munis de roulettes. Elle était même assez grande pour y poser ultérieurement une imprimante et un scanner.

Quand Lucie fit tinter les cloches de la porte d'entrée, Célestine venait tout juste de poser l'écran sur la table. Son amie fit tous les branchements puis le moment tant attendu arriva. Cérémoniale, Célestine appuya sur le bouton et l'écran s'alluma. Elle se mit alors à battre des mains et à sautiller comme une gamine ! Lucie avait récupéré des logiciels qu'elle installa sur l'ordinateur.

— Je te mets AOL comme fournisseur d'accès à Internet, c'est celui que j'utilise. Mais tu verras par la suite, tu pourras changer si cela ne te convient pas. Tu as un mois d'accès gratuit. Bon alors, tu te souviens ? Pour éteindre tu appuies sur « Démarrer ». Si des fois tu avais des problèmes, passe-moi un coup de fil, mais pas après vingt-deux heures, n'est-ce pas Célie ?

— Oui, oui, pas de problème.Allez, sauve-toi, moi je vais faire mumuse !

Sitôt son amie partie, elle se précipita vers l'ordinateur et se brancha sur internet. Elle cliquait un peu partout, ébahie par toutes ces images, les bandes sonores ; elle ne comprenait pas encore tous les fonctionnements mais elle arrivait tout de même à accéder à plein de sites. Lucie lui avait mis « Google » dans ses favoris et Célestine tapa son nom. Elle fut surprise de le voir apparaître écrit en gros ! Elle eut soudain l'impression d'être espionnée et elle ferma aussitôt toutes les fenêtres, puis elle éteignit tout.

Il était plus de onze heures et Théo miaulait dans la cuisine.

— Mon pauvre vieux, je t'avais complètement oublié dans tout ça ! Excuse-moi mon Théo, pour me faire pardonner, je vais te donner quelque chose que tu aimes !

Elle ouvrit son placard et en sortit une boîte de « délices crémiers » dont raffolait son chat. Quand minuit sonna, Célestine dormait déjà à poings fermés et Théo furetait dans le bureau à la découverte de ce nouveau matériel qui avait l'air de tant plaire à sa maîtresse.

À suivre

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