dimanche, 21 octobre 2007
À propos de l'amitié
J’ai envie ce soir – ou plutôt ce matin car il est déjà 5 heures et je n’arrive pas à dormir – de vous parler de mes amies.
Je suis toujours très surprise quand j’entends autour de moi les gens parler de leurs différents amis ou amies. On atteint parfois des nombres astronomiques. Se peut-il qu’on puisse ainsi avoir autant d’amis, ou alors c’est que le mot a perdu tout son sens et que par amis, ils parlent le plus souvent de copains ou de copines, de ces gens qui font partie de notre entourage et avec lesquels on aime faire la fête ou encore se retrouver pour parler de tout et de rien.
Mais un ou une amie, c’est autre chose, c’est tellement plus… D’abord il faut du temps pour que l’amitié se crée, il faut apprendre à se connaître, à s’apprécier, à accepter les différences qu’il peut y avoir entre chacun et enfin il faut se montrer digne d’une amitié. Un ami ou une amie, c’est la personne à qui on peut se confier, se dévoiler sans crainte d’un jugement quelconque.
C’est ma conception, c’est sans doute pourquoi j’ai si peu d’amis. Mais le nombre importe peu, c’est la qualité de l’amitié qui, seule, importe.
J’ai eu l’occasion de m’en rendre compte une fois de plus aujourd’hui. C’est pourquoi je tiens à rendre un hommage à deux de mes amies, Julie et Roseline.
Je vais commencer par Julie, la plus jeune des deux, elle va avoir 26 ans le mois prochain. Si vous êtes un lecteur assidu de mon blog, vous devez savoir que Julie est une de mes anciennes élèves. Elle avait 10 ans quand elle est arrivée pour la première fois dans ma classe. Son début de scolarité avait été pour le moins houleux et elle était devenue un peu la tête de turque de son école précédente. L’inspecteur avait donc jugé préférable de l’envoyer ailleurs. Et ce fut chez moi, on aurait pu penser qu’elle était mise sur une voie de garage. Mais par chance sa maman était très présente, nous avions à l’époque une psychologue scolaire de grande qualité. Julie avait toutes les capacités requises pour suivre une scolarité normale. Il fallait juste trouver le moyen de canaliser une personnalité un peu trop expansive ! D’un commun accord avec la psy et les parents, nous avons redonné une autre chance à Julie et elle a pu ainsi réintégré le cycle dit normal. Nous sommes toujours restées en contact et je l’ai revue 10 ans plus tard ; elle venait d’obtenir le bac professionnel. Peu après elle était reçue au concours d’aide soignante.
Elle est étonnante Julie, elle m’impressionne bien souvent par son courage et sa volonté. Elle exerce un métier ingrat dans un service hospitalier particulièrement difficile, le service de la gastro-entérologie. La plupart des malades sont des alcooliques en phase ultime, le ventre gonflé comme un ballon de baudruche par l’ascite, des êtres grincheux, acariâtres, agressifs parfois, qui ne contrôlent plus leurs organes et déjectent quotidiennement dans leur lit. Et malgré tout ça, il y a des femmes assez courageuses pour les nettoyer, changer les draps tous les jours,trouver le temps de leur parler, essayer de les rassurer, atténuer leur souffrance par des gestes ou des petits mots gentils. Et puis faire face à la mort car elle fait des ravages chaque semaine dans ce service. Sans parler des horaires et du surplus de travail quand une collègue manque à l’appel et qu’elle n’est pas remplacée. Ses femmes, je les appelle les femmes de l’ombre, parce qu’elles passent tout à fait inaperçues aux yeux des médecins, elles font partie des meubles, ils ne les voient pas. Quelle ingratitude !
Une fois sortie de son milieu professionnel, Julie est toujours aussi surprenante. Ainsi elle joue au tennis le jeudi soir ( elle est classée !), le lundi elle fait du théâtre. J’étais allée la voir jouer il y a deux ans, lors d’une représentation au théâtre du Plessis à La Riche. C’était un texte difficile de Samuel Beckett et elle avait une très longue tirade dont elle s’était sortie d’une manière remarquable.
Alors hier soir, alors que j’étais à me morfondre dans mon lit, Julie est venue avec Olivier. Et tandis qu’Olivier s’est acharné pendant plus de deux heures à me rendre l’ordinateur performant, Julie me racontait des histoires drôles qui avaient pour conséquence de me faire rire et hurler de douleur en même temps !
J’ai beaucoup de chance d’avoir une amie comme Julie et je la remercie de tout ce qu’elle peut m’apporter de bonheur et de joie de vivre !
Ma deuxième amie s’appelle Roseline. Elle est âgée de 44 ans. Elle aussi fait partie de ces femmes de l’ombre, celles que l’on croise sans les voir… Elle est « technicienne de surface», d’ailleurs ce n’est plus le terme exact, depuis quelque temps on les appelle des …. ( j’ai oublié !). Bref, comme dit Roro elle-même, « je suis femme de ménage ».
La vie ne l’a pas véritablement gâtée jusqu’à présent. Une vie de couple difficile qui a fini par une séparation et l’obligation de trouver un emploi pour subvenir à ses besoins comme on dit.
Roseline s’est mariée très jeune ( 17 ans) et elle a élevé ses trois enfants. Elle ne travaillait pas et consacrait toute son existence à son mari, ses enfants et l’entretien de sa maison. Elle finit bientôt par se confondre avec les murs jusqu’au jour où, ses enfants ayant atteint l’adolescence, elle trouva l’occasion de s’évader un peu de ce confinement en faisant la surveillance de la cantine dans l’école où j’étais en poste. Deux heures par jour qui furent pour elle un véritable rayon de soleil. C’est ainsi que je fis sa connaissance. Mais son mari n’apprécia pas du tout de la voir prendre un peu d’indépendance et peu de temps après il la quitta. Comme c’était un parfait coucou, il se trouva vite une autre femme qui, faute d’être un canon de beauté, avait l’avantage de vivre seule, d’avoir une maison et pas mal d’argent. Elle avait aussi des enfants, mais ça, le coucou il s’en foutait.
Quand il quitta Roseline, il la laissa donc sans argent, avec les trois enfants en charge et un dossier d’endettement. Quel courage elle montra pour supporter une séparation après plus de 20 ans de vie commune, se battre pour obtenir un poste à temps plein et gérer les problèmes de ses enfants qui avaient mal encaissé la séparation de leurs parents.
Et malgré tout ça, c’est elle qui vient consoler les autres quand ça ne va pas… Elle qui se bat au quotidien pour joindre les deux bouts. Elle ne sort jamais, ne part pas en vacances, fait un travail ingrat sans guère de reconnaissance.
Ce matin, à 8 heures, je l’ai appelée car je ne pouvais pas me lever. Une demi-heure plus tard elle était à la maison.
Vous ne pensez pas que j’ai bien de la chance d’avoir ainsi de telles amies ?
J’avais envie de le dire et de leur rendre hommage.
04:50 Publié dans Croque mots | Lien permanent | Commentaires (9)
Commentaires
In vino véritas
est-ce l'alcool qui déforme l'homme ?
ou est-ce l'homme qui décide que l'alcool lui permet d'oublier sa condition ?
Mais même si notre logique est construite sur le sophisme cartésien, la réalité reste que ce sont les inter-actions des deux qui nous fait prendre le chemin.
Cordialement
Écrit par : temps | dimanche, 21 octobre 2007
Je ne vois pas le rapport avec l'amitié !
Écrit par : tinou | dimanche, 21 octobre 2007
coucou tinou
merci beaucoup ( tres emue en lisant ta note ) j ai pas l habitude qu on me rende des hommages comme cela , ca fait super plaisir !! ca me va droit au coeur !!
moi aussi tinou je te remercie pour ton amitie sincere !!
bisous
Écrit par : juju | dimanche, 21 octobre 2007
coucou tinou
j espere que ca va mieux ton dos ,?
bisous juju
Écrit par : juju | lundi, 22 octobre 2007
Coucou Juju, je peux me lever et marcher, mais je ne suis pas encore sortie, j'ai toujours une légère douleur et je ne veux pas forcer. Je te téléphone ce soir !
Écrit par : tinou | lundi, 22 octobre 2007
leur sourire en dit long sur l'amitié qui vous lie.
Écrit par : maazz | lundi, 22 octobre 2007
Tu trouves ? Ce sont deux filles épatantes.
Écrit par : tinou | lundi, 22 octobre 2007
Bonsoir Tinou,
Je trouve ça épatant de rendre hommages à tes amies, je pense que l'on ne dit jamais assez aux gens qu'on les aime!!!! Cela devrait les toucher et je les trouve sympas.
Bonne continuation
Tom
Écrit par : TomD | lundi, 22 octobre 2007
Oui Tom, je suis tout à fait d'accord avec toi, par pudeur on ne dit pas ses sentiments et c'est un grand tort.
Écrit par : tinou | mardi, 23 octobre 2007
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