samedi, 13 février 2010
58. Sur les bancs de l'école -4-
Année 1957. Sur les ondes, la voix de Piaf provoque toujours autant de frissons. Quand je ré-écoute la foule, j’ai des souvenirs très nets qui reviennent en image. Nous étions allés un jour à Paris pour acheter un singe. Quelque temps auparavant, mes parents avaient songé qu’il serait peut-être intéressant pour moi d’apprendre à jouer d’un instrument de musique. Nous étions même allés chez une voisine qui possédait un piano. J’étais euphorique ! Seulement, à force de trop réfléchir à la question, ils ont probablement fait des calculs – prix de l’instrument, prix des leçons – et finalement ils ont changé d’avis. Je pense que l’expérience malheureuse de mon père dans sa jeunesse a largement influencé ce changement d’avis. Ses parents s’étaient mis en tête de lui faire donner des leçons de violon. Seulement la différence de taille c’est que si, lui, n’avait jamais eu l’envie de jouer du violon, moi j’étais enthousiasmée à l’idée d’apprendre à jouer du piano. Donc le problème fut tranché : pas de piano, mais un singe pour maman ! Le coup a été rude à encaisser. Je me suis rattrapée beaucoup plus tard (vingt ans après), mais hélas un peu trop tard aussi pour la dextérité ! Dans le coup, j’ai tout abandonné.
Nous avions dû aller déjeuner aux Halles. Je revois les bâtisses en ferraille, les hommes transportant sur les épaules des quartiers de bœuf. Et puis, en fond sonore, la voix de Piaf…
L’après-midi nous avions fait tous les magasins du quai de la Mégisserie. À un moment, ma mère est tombée en arrêt devant une grande vitrine dans laquelle un malheureux gibbon se suspendait à une barre de fer. Je crois que c’est le prix qui a fait hésiter mon père. Le soir nous sommes revenus avec une cage dans laquelle se trouvait un pauvre macaque Rhésus que maman appela Bamby ! Je n’ai jamais très bien compris comment mon père avait pu céder ainsi à un tel caprice. Le singe eut vite fait de prendre ses marques. Dans les premiers jours, alors qu’il était laissé en liberté dans la salle à manger, il vida carrément tout le buffet … Dans le jardin, nous avions une immense volière construite par mon grand-père. Ce fut donc sa nouvelle demeure. Je n’aime pas parler de cette histoire car j’ai toujours personnellement beaucoup souffert de voir cet animal en cage. De temps à autre, lorsque nous allions nous promener à la campagne, nous emmenions le singe.
Il était alors attaché avec un collier autour des reins. Il vécut ainsi pendant cinq ans et connut une fin atroce. C’était en 1963, et mes parents avaient fait une réservation de vacances dans un hôtel de l’île de Ré pour une durée de quinze jours. Il avait été convenu que c’est mon arrière grand-mère –qui demeurait la maison à côté de la nôtre- qui garderait le singe durant notre absence. Mon père avait placé le pauvre animal dans une minuscule cage de 1m/1m et transporté la cage chez mon aïeule en prenant soin de lui donner les ultimes recommandations, à savoir ouvrir la cage sous aucun prétexte.
Au retour de vacances, nous trouvâmes une grand-mère dans tous ses états à côté d’un petit singe qui avait le crâne fracassé ! Elle n’avait pas pu résister et avait bien sûr ouvert la cage (comme je la comprends !). Mais le singe en avait profité pour s’échapper. Affolée, elle avait alors appelé les pompiers qui avaient récupéré Bamby dans un platane du boulevard. Ils avaient dû quand même s’acharner sur le pauvre animal car il n’était pas beau à voir !
À la suite de cet incident, ma pauvre grand-mère fut mise en quarantaine. Je trouvai cela profondément odieux. Quant à ma mère, elle sombra dans une nouvelle période de dépression. Par chance, la folie des animaux exotiques lui passa et par la suite, nous adoptâmes des chiens.
Photo de la classe de CE2, année scolaire 1957/58. Je ne savais pas encore que c’était ma dernière année dans cette école. En effet, depuis un an déjà, mes parents avaient projeté de me faire passer le concours d’entrée au petit lycée. L’année précédente, il n’y avait pas eu de concours, les places libres ayant été prises en priorité par les rapatriés du Maroc et les premiers rapatriés d’Algérie.
Là encore, j’ai quelques souvenirs. Nous étions environ une dizaine de gamines issues de diverses écoles primaires de Tours. Il y avait trois places seulement. Je fus admise. J’allais quitter l’ambiance chaleureuse d’une petite école d’un quartier populaire pour pénétrer dans un monde beaucoup plus guindé.
Quelques évènements de l’année 1957 :
14 janvier : mort de l’acteur américain Humphrey Bogart.
10 mars : le gouvernement chinois lance sa campagne sur la limitation des naissances.
25 mars : signature des Traités de Rome. Naissance de la C.E.E avec 6 pays (France, Belgique, Italie, Luxembourg, Allemagne, Pays-Bas) et d’Euratom (communauté européenne de l’énergie atomique).
20 avril : reprise de la navigation dans le canal de Suez.
12 mai : mort du comédien Erich von Stroheim.
22 juillet : Jacques Anquetil remporte le 44ème tour de France.
24 juillet : mort de Sacha Guitry.
À suivre …
03:33 Publié dans Nostalgie | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
♫ Je revois la ville en fête et en délire suffoquant sous le soleil et sous la joie ♫
J'adore Piaf aussi ;-)
Et j'adore tout autant lire tes récits....
♫ Et la joie éclaboussée par son sourire me transperce et rejaillit au fond de moi ♫
C'est entraînant tout plein cette chanson, et les autres. Elle vous donne envie de tourbillonner sur soi même ! Se laisser entraîner............. par la musique.
Merci
Écrit par : Christine3769 | samedi, 13 février 2010
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