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jeudi, 05 décembre 2013

209. Les petits travaux disparus -8-

Il fut question pour Mimi d’aller à l’école. Il y eut des discussions entre maman et Mélina à ce sujet ; Mélina trouvait Mimi trop petite … Maman voulait couper court à toutes ces gâteries et elle voulait la mettre à l’école, me trouvant assez grande pour l’emmener. Ce doit bien être après toutes ces discussions que Mélina s’en alla de la  maison et que j’eus la charge de m’occuper de ma sœur. C’était moi maintenant l’aînée du groupe d’enfants (Jean et Jeanne venaient de quitter l’école). Je pris  mon rôle de grande sœur très au sérieux ; Personne n’avait le droit de toucher, ni de donner des ordres à ma sœur. J’en étais responsable !

Mimi était peureuse : elle avait peur de l’orage, du grand vent ; Elle n’aimait pas qu’on s’amuse en chemin et voulait rentrer.

C’est que je n’étais plus aussi libre ! À la cantine il fallait surveiller son repas et c’est ainsi que je pris l’habitude de surveiller et d’aider d’autres petits. On m’appelait « la mère Gigogne ». Je mouchais, débarbouillais, j’avais toujours quelques petits à mes trousses. En récréation je devais faire jouer Mimi car elle était craintive. Cela me retardait dans mes jeux ; Nous faisions des parties de balles au chasseur, nous étions en équipe. La récréation était toujours trop courte.

Souvent Grand-père et Grand-mère –les parents de maman- venaient nous voir le jeudi, assis dans leur tombereau attelé de Boulotte, une jument vraiment pas belle, pécharde, très ronde, aucune comparaison avec Cocotte. Nous les voyions venir de loin … Je courais alors à leur rencontre.

Grand-père m’attrapait par les bras et hop ! Je m’installais entre eux deux, assise sur une planche en travers du tombereau qui leur faisait un banc et Grand-père me donnait les guides et là j’étais heureuse comme une reine !

J’essayais de faire claquer les guides sur la croupe bien ronde de Boulotte mais elle n’allait pas plus vite pour ça … Elle tenait juste entre les timons du tombereau et ne pouvait pas courir.

Je bavardais comme une pie, ce qui amusait beaucoup Grand-père. Il me donnait du chocolat, il en avait toujours dans ses poches.

En arrivant j’aimais montrer la basse-cour à Grand-mère. Maman avait beaucoup de volailles : poules et poussins, pintades criardes, canards et canetons. Je me rappelle être restée de longs moments à regarder nager, plonger, sauter pour attraper les moustiques sur la fosse, le soir, ces canetons vifs, dégourdis et si mignons.

 

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Il y avait aussi les lapins avec toujours quelques nichées nouvelles. Je ne me suis jamais lassée d’admirer une lapine protégeant son nid douillet ou regardant avec étonnement ses petits faisant leur première sortie.

Quelques fois je me mettais à nettoyer les cases, mettre de la paille fraîche, mais il m’arrivait d’être griffée ou alors un lapin s’échappait. Maman n’approuvait pas toujours ces initiatives car j’entreprenais plus que je ne pouvais faire et une fois le travail en route il fallait bien le terminer et il fallait donc m’aider.

Mélina étant partie, maman avait beaucoup de travail : les vaches, la basse-cour, la cuisine, la lessive, enfin tout. Papa décida alors de faire venir une jeune fille bretonne. À cette époque les gens étaient malheureux et certains qui voulaient gagner un peu d’argent devaient quitter leur chère Bretagne …

 

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Un jour Joséphine arriva, toute timide. Elle parlait breton, ne savait presque pas lire ni écrire et de cela j’en étais bouche-bée … J’essayais par la suite de lui apprendre mais ça ne lui plaisait pas. Dans sa valise elle avait un magnifique costume breton avec un tablier en soie brodé ; Elle couchait avec moi et le soir je lui posais un tas de questions. Elle me racontait qu’elle avait un amoureux, Mathurin, qu’elle n’aimait pas du tout. Elle me parlait de son Morbihan, de sa famille. Elle était très pieuse et allait à la messe tous les dimanches avec ce beau costume, mais, comme elle était très regardée, elle renonça et s’habilla comme les jeunes du pays. Elle s’étonnait que nous n’allions pas à la messe. Papa disait qu’il suffisait d’être parfaitement honnête et surtout de ne jamais faire de tort à personne. Cependant nous étions tous baptisés, maman m’avait appris ma prière et aussi que le Bon Dieu aimait chacun de nous mais qu’Il savait tout ce que nous faisions, même ce que nous pensions et cela s’est incrusté en moi. Je posais un tas de questions à maman sur la vie, le monde, etc.

Nous recevions du Maroc des nouvelles d’Aimé, maman répondait et moi je mettais un petit mot. À l’école nous avions été photographiées. Je me rappelle avoir envoyé une photo qui représentait un avion avec moi-même au poste de pilotage, c’était amusant ! (J’ai encore une photo).

Je commençais à avoir de meilleures notes à l’école mais j’avais du mal avec les dictées. C’est vrai que la grammaire m’ennuyait ; Par contre j’aimais tout le reste, surtout le calcul, les problèmes, mais j’étais étourdie.

Il arriva une période où ne reçûmes plus de courrier du Maroc, mon frère nous ayant écrit qu’il partait en « colonnes ». Le climat était trouble et mes parents s’inquiétèrent. En allant ou en revenant de l’école les gens me demandaient si on avait des nouvelles, je n’aimais pas ça, l’inquiétude me gagnait aussi. Maman était triste, papa lisait tous les articles sur le Maroc. Cela dura plusieurs semaines. Enfin un jour il y eut une lettre et tout reprit son cours normal.

 

À suivre  

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