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lundi, 19 octobre 2015

110. Purge

Quand je reviens de voyage, j'aime bien lire des romans dont l'histoire se déroule dans le pays visité. Actuellement je finis donc un roman écrit par Sofi Oksanen, née en Finlande en 1977, d'un père finlandais et d'une mère estonienne. Ce livre s'intitule "Purge" et au travers de personnages très forts, on revit cinquante années de l'histoire de ce petit pays qu'est l'Estonie.

J'ai choisi aujourd'hui un passage de ce livre qui m'a particulièrement frappée. Nous sommes en 1986, la centrale nucléaire de Tcherbobyl, en Ukraine, vient d'exploser :

" Années 1980, Estonie occidentale.purge.jpg

Tandis qu’approchait le défilé du Ier Mai en 1986, Aliide était certaine que la jambe de Martin ne supporterait pas une marche de ce genre, mais Martin n’était pas d’accord et il prit part à la célébration énergiquement avec Aliide à son bras. Lénine flottait majestueusement sur le drapeau rouge, le regard vers l’avenir, et Martin avait le même air décidé orienté vers l’avant. Un  bon vent flottait sur les drapeaux et sur les gens, l’air était compact de fleurs et de roulements de tambours.

Le lendemain, Talvi appela de Finlande.

  Maman, reste là-bas.

— Quoi ? Pourquoi ? Qu’est-ce qui s’est passé ?

— Est-ce que tu as de l’iode ?

— Non.

— Un réacteur nucléaire a explosé en Ukraine.

— Mais non.

— Si. En Finlande et en Suède on a mesuré des taux de radiations élevés. Tchernobyl. Là-bas on vous a sûrement rien raconté.

— Non.

— Garde papa à l’intérieur et procure-toi de l’iode. Ne dis rien  à papa. De toute façon il le croira pas. Ne mangez pas de champignons ou de baies. Et plus tard vous n’en cueillerez plus.

C’est plus la saison.

— Sérieusement, maman. Plus tard en automne. Vous allez rester à l’intérieur quelques jours, là. Alors le plus gros des retombées sera passé. En Finlande on ne peut plus sortir les vaches, pour qu’elles ne broutent pas d’herbe contaminée. On n’utilise plus la hotte aspirante non plus … 

La communication fut coupée. Aliide raccrocha le combiné. Talvi semblait effrayée, ce qui n’était pas dans ses habitudes. En général, elle avait une voix monotone. Ça lui était venu depuis qu’elle avait déménagé pour s’installer chez son mari en Finlande. Et elle n’appelait pas souvent, très rarement, ce qui était compréhensible, bien sûr, parce q’uil fallait demander une autorisation pour téléphoner et on ne l’obtenait pas toujours, et si oui, c’était à grand-peine qu’il fallait attendre des heures qu’une ligne audible soit établie. Ce qui était d’autant plus répugnant quand on savait que les communications étaient écoutées.

Martin cria dans le séjour :  C’était qui ?   

— Talvi.

— Pourquoi elle appelait ?

— Comme ça. On a été coupées.

Aliide alla regarder les nouvelles. On n’y disait rien à propos de Tchernobyl, bien que l’explosion se fût déjà produite depuis plusieurs jours. L’appel de Talvi ne semblait pas intéresser Martin plus que ça. Et si cela l’intéressait, il ne laissait rien paraître. La distance entre Martin et Talvi s’était particulièrement creusée après que Talvi avait quitté le pays. Pour sa fille, brillante pionnière, Martin avait projeté une belle carrière au parti. Il n’accepterait jamais que Talvi soit passée à l’Ouest.

Le lendemain, le magasin du village reçut un arrivage de marchandises. Aliide alla faire la queue à vélo, mais elle passa aussi à la pharmacie pour prendre de l’iode, que bien d’autres étaient en train d’acheter aussi. C’était donc vrai. Quand Aliide rentra à la maison, Martin avait eu vent de l’affaire par ses amis.

 — Toujours le même genre de mensonges. La propagande de l’Ouest. 

Aliide avait pris le flacon d’iode et elle était sur le point d’en verser dans l’assiette de Martin quand elle décida de laisser courir.

À parti du 9 mai, les hommes du kolkhoze reçurent des convocations du commissariat de la guerre.

«  Pour des manœuvres de réserve », c’était formulé comme ça. Du Printemps de la Victoire partirent quatre conducteurs. Puis le médecin et les pompiers. On ne racontait encore rien d’officiel sur Tchernobyl. Toutes sortes de bruits circulaient, et d’aucuns racontaient que ceux qui avaient été emprisonnés pour leurs opinions étaient envoyés en direction de Tchernobyl. Aliide eut peur.

  Pas mal de gens sont appelés, dit Martin, rien d’autre, mais il mit en sourdine ses protestations sur la propagande fasciste de l’Ouest.

Les aînés étaient sûrs que ces appels étaient un signe de guerre. Le fils Priks se cassa la jambe, il se débrouilla pour sauter du toit afin d’obtenir un certificat médical d’exemption. Et le fils Priks n’était pas le seul à procéder ainsi. À la place de chaque exempté on envoyait quelqu’un d’autre.

Et Aliide non plus ne pouvait être sûre que tout cela ne signifierait pas que la guerre éclatait. Le printemps avait-il été anormal, d’une façon ou d’une autre ? Et l’hiver ? Le printemps, en tout cas, avait été un peu plus précoce – aurait-elle dû en déduire quelque chose ? Aurait-elle dû comprendre, quand elle triait les pommes de terre à semer, dans le champ, que la terre était plus sèche que d’ordinaire à la même époque ? Que la neige avait fondu un peu trop tôt ? Quand la pluie de printemps bruinait et qu’elle ne portait dans le champ qu’un chemisier à manches courtes, aurait-elle dû pressentir que quelque chose allait de travers ? Pourquoi n’avait-elle rien remarqué ? Ou bien était-elle seulement devenue si vieille que son instinct défaillait ?

Une fois, Aliide vit Martin qui cueillait une feuille sur un arbre et l’observait des deux côtés pour la déchirer ensuite, sentait ses mains, sentait la feuille, allait examiner le compost, ramassait le pollen à la surface du baquet à eau de pluie et l’examinait.

— Martin, ça se voit pas à l’œil nu.

Martin susauta comme s’il avait été surpris en train de faire quelque chose qu’il n’aurait pas dû.

— Qu’est-ce que tu radotes ?

— En Finlande, ils gardent les vaches à l’intérieur.

— Ils sont fous.

Le ciment disparut de toute l’Estonie, parce qu’on en avait besoin en Ukraine, et d’Ukraine et de Biélorussie commença à arriver en Estonie plus de nourriture qu’avant. Talvi interdisait à sa mère d’en acheter. Aliide disait oui oui. Mais qu’est-ce qu’on aurait pu acheter d’autre ? La nourriture saine d’Estonie allait à Moscou et on donnait aux Estoniens les provisions de là-bas, dont Moscou, à cause de ce qui était arrivé, ne voulait pas.

Plus tard, Aliide entendit des histoires sur des champs couverts de dolomites et sur des trains bondés de gens évacués, d’enfants en pleurs, de soldats qui conduisaient des gens hors de chez eux et d’étranges flocons, bizarrement scintillants, qui remplissaient les cours, et que les enfants essayaient d’attraper et dont les petites filles voulaient décorer leurs cheveux, mais les flocons disparaissaient, comme plus tard les cheveux sur la tête des enfants.

Un jour, la femme de Priks prit Aliide par la main sur la place du village et soupira que , Dieu soit loué, son fils s’était cassé la jambe, Dieu soit loué, il avait été bien inspiré. La femme de Priks répéta ce que les amis de son fils, ceux qui avaient dû partir, avaient raconté de ce qui se passait là-bas. Et ils ne se réjouissaient plus du tout de l’augmentation de salaire accumulée à l’époque de Tchernobyl, car leur peau rayonnait de peur. Ils avaient vu comment les gens avaient enflé jusqu’à devenir méconnaissables. Comment les gens avaient pleuré leurs maisons et comment les agriculteurs retournaient en cachette travailler dans les champs de la zone interdite. Comment les maisons désertées étaient pillées et comment les affaires étaient vendues au marché, les télévisions, magnétophones et radios se répandaient dans tout le pays, les motos et les astrakans. On avait abattu des chiens et des chats et on en avait rempli des fosses interminablement. La puanteur de la chair en putréfaction, les maisons, les arbres et terrains enterrés, les couches de terrain pelées et les choux, oignons et buissons ensevelis. On leur avait demandé si c’était la fin du monde, ou la guerre, ou les deux. Et contre qui on faisait la guerre, qui fallait-il vaincre ? Des vieilles qui faisaient des signes de croix, interminablement. De la vodka et de l’eau-de-vie, interminablement.

Avant tout, la femme de Priks soulignait comment un des garçons avait donné un conseil important à ceux qui avaient pu se sortir de là : ne racontez jamais que vous avez été à Tchernobyl, ou bien toutes les filles vous rejetteront. Ne le racontez jamais, parce que personne ne voudra d’enfants avec un contaminé. [ …]

En entendant parler de femmes qui quittaient leur mari, Aliide ressaillit, son tressaillement s’adoucit en tremblement, et elle regarda d’un œil neuf les jeunes hommes qu’elle croisait dans la rue, elle cherchait parmi eux ceux qui revenaient de là-bas et elle reconnaissait en eux quelque chose de familier. Elle le voyait dans leur regard, plus ou moins ombrageux, et alors elle sentait le désir de proter la main sur les joues de ces garçons, de les toucher.

Martin Truu s’affaissa finalement dans la cour tandis qu’il examinait à la loupe une feuille de bouleau. Quand Aliide trouva son mari et retourna le corps pour lever le visage vers le ciel, elle vit la dernière expression de Martin. C’était la première fois qu’elle voyait Martin étonné."

 

 

 

jeudi, 01 octobre 2015

106. Pays baltes -9-


podcast

Lundi 14 septembre : Visite de Tallinn

 Ce matin, le temps est assez gris et froid. Mais on peut toujours se consoler en pensant qu’il ne pleut pas !

Premier arrêt devant le Palais présidentiel où deux gardes font le pied de grue.

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À 10h nous allons visiter le château de Kadriorg qui fut construit au XVIIIe siècle par le Tsar Pierre-le-Grand pour son épouse. De nos jours, ce château contient une belle collection d’objets et de tableaux.

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Parmi ces derniers, j’en ai retenu quelques-uns qui m’ont particulièrement touchée : 

Forêt de pins, d’Ivan Shishkin (1832-1898) :

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Paysans en Ukraine, de Mikhail Clodt (1833-1902) :

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Le vieil homme, d’Ivan Kramskoi

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Jeune paysanne avec un enfant, de Vladimir Makovski (1846-1920)

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Retour du soldat, d’Ilja Repin (1844-1930)

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Avant de retourner dans le centre historique, le car nous conduit en bord de mer pour une vue panoramique de la ville.

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Nous déjeunons au même endroit qu’hier soir et l’après-midi nous flânons dans la ville basse. Tallinn est située face au golfe de Finlande et fut fondée en 1219 par des envahisseurs danois. Au Moyen Age, elle fut membre de la Hanse ce qui a permis son développement rapide.

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Place du Marché :

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Vieille ruelle :

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Nous grimpons ensuite dans la ville haute et nous arrivons en pleine manifestation d’agriculteurs mécontents et qui veulent que ça se sache ! Ils sont à peine une cinquantaine et brandissent des ballons colorés en forme de vaches ou de cochons.

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Tout près se dresse une belle église orthodoxe.

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Vue sur Tallinn depuis les remparts de la ville haute :

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Nous redescendons tranquillement les ruelles de la cité médiévale et c’est maintenant l’heure du choix :

— Vous avez la possibilité de retourner dans la ville basse, ou bien nous rentrons à pieds à l’hôtel.

J’opte pour la deuxième solution car il commence à faire frisquet. Je sais déjà que je ne vais pas ressortir pour le dîner ; aussi fais-je quelques dernières photos sur le chemin de l’hôtel.

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Je préviens la guide que je ne participerai pas au dîner et lui redonne son matériel audio. Il arrive un moment où je sature vraiment et là, c’est le cas. J’ai besoin d’être tranquille.

Vers 19h30 je descends à la cafétéria prendre un sandwich, une  part de gâteau et un café au lait. Puis je remonte dans ma chambre, je me mets en pyjama et je regarde les infos (on capte France 2).  

 

Mardi 15 septembre : le retour.

Les départs des membres de notre groupe sont échelonnés. Pour ma part, je quitte l’hôtel tôt dans la matinée. Vers 11h30 l’avion atterrit à Roissy et je chope le TGV de 14h... ?

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À 16h le train entre en gare de Saint-Pierre-des-Corps ; Sur le quai, au loin, j’aperçois Peggy.

— Coucou Mutti !

 

FIN  

09:58 Publié dans Voyages | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : voyage, estonie, tallinn

lundi, 28 septembre 2015

105. Pays baltes -8-

Dimanche 13 septembre : Bienvenue en Estonie.

 Nous quittons donc Riga à 9h. En chemin nous nous arrêtons pour visiter une grotte où figurent des inscriptions sur les murs.

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Ne me demandez surtout pas la signification car je n’en ai aucune idée ! En effet, au moment où la guide donnait les explications, j’étais en train de me bagarrer avec l’appareil audio. Quand –enfin- j’ai réussi à le mettre en route, ce fut pour entendre :

— Voici donc l’histoire de cette grotte !

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Bon, tant pis, je fais une recherche sur Internet. Voilà, c’est ICI.

Je comprends mieux pourquoi tout le monde –sauf moi bien sûr- s’est accroupi et a plongé les mains dans cette eau prétendument curative.

Quelques kilomètres plus loin, nouvel arrêt devant un château. La visite commence et la guide nous dit :

— Branchez vos appareils s’il vous plaît !

Jusque là tout va bien. Mais c’est alors que mon appareil photographique m’indique que ma carte est pleine !  Tout en marchant, je change de carte et je commence à prendre des photos. Au bout de quelques minutes, en voulant vérifier une photo, je m’aperçois que la nouvelle carte contient déjà les photos que j’ai prises en Italie. Comme je ne veux pas supprimer les clichés que je viens juste de prendre, je décide donc de supprimer les photos italiennes une à une. Seulement, j’avais oublié qu’il y en avait environ 400 ! Pendant ce temps-là, notre guide a commencé son laïus … Autant dire que j’ai écouté d’une oreille plutôt distraite.

Un quart d’heure plus tard, je suis enfin à jour dans mon tri, seulement voilà, les explications sont terminées. Je n’étais plus du tout motivée, aussi j’ai fait peu de photos de l’endroit.

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Il s’agit du château  fort de Turaida, tellement restauré qu’on a l’impression qu’il vient juste de sortir de terre !

Nous nous arrêtons vers 13h pour le déjeuner. C’est là en fait que nous avons mangé du poisson au fort goût de vase.

Puis la route reprend ; au fond je somnole un peu, coincée entre la vitre et une dame qui passe tout son temps à recopier ce que dit la guide. C’est impressionnant la vitesse à laquelle elle écrit ! Des fois, elle a des trous et me demande des précisions. La pauvre, elle est mal placée car je ne suis pas du tout attentive !

Elle vient d’entamer son deuxième carnet. Dans la rue, elle prend aussi des notes tout en marchant. C’est son  mari qui est chargé des vidéos.

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La pause-bio intervient au moment où l’on atteint l’ancien poste douanier entre la Lettonie et l’Estonie. Notre chauffeur doit en effet faire un arrêt après plus de deux heures de conduite. Je l’aime bien cet homme, il est calme, discret, très méthodique dans le rangement des bagages dans la soute.

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Puis la route reprend. Le trajet est monotone, on ne voit pratiquement aucune habitation, que des champs et des forêts. Nous atteignons Tallinn, la capitale estonienne, vers 19h.

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Le temps que la guide distribue à chacun la clef de sa chambre, je m’installe au-dehors pour fumer une cigarette. Je suis bientôt rejointe par une femme du groupe et son mari. Elle s’apprête à allumer une cigarette quand l’homme lui dit sur un ton qui n’admet pas de réplique :

— Tu n’as pas le droit de fumer ici ! Regarde le panneau, c’est indiqué en gros !

Effectivement, l’entrée de l’hôtel est entourée d’une bande blanche au sol et une pancarte écrite en rouge mentionne qu’ IL EST INTERDIT DE FUMER à quatre mètres autour.

En disant cela, il me regarde aussi, moi qui suis assise près du cendrier mural.

— Tu m’fais chier ! rétorque alors son épouse qui va aussitôt à l’autre bout de la rue.

Cette réflexion semble le laisser tout penaud, mais comme il continue à me regarder, alors j’en rajoute une couche :

— Écoutez, il y a un cendrier fixé au mur. Laissez donc chacun faire ce que bon lui semble !

Furibond, il rentre dans l’hôtel. Non, mais c’est vrai ça, de quoi je me mêle ?

Il est prévu que nous ressortions à pieds pour aller dîner dans le centre historique de Tallinn. Certaines s’inquiètent déjà de la distance à parcourir, d’autant que le vent a très nettement fraîchi :

— Non, ce n’est pas loin, environ 10 minutes de marche , rétorque la guide.

Un quart d’heure, vingt minutes, trente minutes  plus tard dans des ruelles grossièrement pavées … Ah, nous y voici enfin ! Quoi de bon au menu ? Ah, chouette ! Du poulet pané et des pommes de terre, on ne va pas être dépaysé. Prenons des forces car on a encore trente minutes de marche pour le retour !

À suivre

 

   

10:28 Publié dans Voyages | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : voyage, lettonie, estonie