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lundi, 12 avril 2010

144. Les derniers jours de Pékin -1-


podcast

À un bon mois avant mon départ en voyage, me voici de nouveau  plongée avec fascination dans les récits écrits par Pierre Loti.

L'écrivain fit deux séjours rapprochés dans la capitale chinoise. Le premier séjour eut lieu du 18 au 30 octobre 1900 et le second, du 18 avril au 5 mai 1901.

Si aujourd'hui Pékin n'est plus qu'à une petite dizaine d'heures en avion, il en était tout autrement au début du XXe siècle. On peut parler de véritable expédition ! Une expédition dans un pays qui en ce début de vingtième siècle fascinait et terrifiait à la fois l'Europe. Ne parlait-on  pas du «péril jaune» ?

La Chine de Loti n'a plus rien à voir avec celle d'aujourd'hui, si ce n'est la densité de population. Le péril jaune est toujours d'actualité, mais il a pris une toute autre forme que celle dépeinte au siècle précédent. Ce n'est pas une armée qui déferle sur notre vieille Europe, mais plus sournoisement une invasion économique que rien ne pourra arrêter. Mais ceci n'est pas le sujet de ma note.B_REDOUTABLE[1].jpg

J'ai envie de vous faire partager des émotions ressenties à la lecture de ce récit de voyage. Un voyage qui débute le 2 août 1900 à bord du cuirassé le Redoutable qui appareille de Cherbourg pour la Chine. Un voyage de routine, pensez-vous ? Absolument pas. Le navire rejoint les flottes des puissances alliées (Allemagne, Autriche, Grande-Bretagne, Russie, Japon, Italie) pour faire face à la rébellion des Boxers qui, depuis près de deux ans, agressent sauvagement les étrangers installés en Chine, avec l'accord plus ou moins tacite de l'impératrice Tseu-Hi.

Après les escales obligatoires que tous les marins ayant navigué dans cette partie du monde connaissent bien - à savoir Port-Saïd, Aden, Colombo et Saïgon - le cuirassé arrive en rade de Takou le 24 septembre. Personne n'est autorisé à descendre et le navire se dirige alors au nord vers Shanhaiguan, dans le golfe de Petchili, qu'il atteint le 2 octobre.

L'impératrice Tseu-Hi :

TseuHi[1].jpgLes troupes sont alors débarquées et installées dans un fort, tout près de la Grande Muraille. Elles retrouvent bientôt les armées des autres pays alliés.

( À cet instant je repense à mon arrière-grand oncle, Simon ;  je pense qu'il aurait sûrement participé à cette expédition si la mort ne l'avait pas surpris en 1894 à la frontière sino-vietnamienne).

Imaginez maintenant que vous accostez sur la plage et vous partez en reconnaissance des lieux. Voici ce qui s'offre à votre vue, ce 3 octobre 1900 :

« Par ce frais matin d'octobre, sur la route ombragée qui mène au fort des Français, les matelots et les soldats de toutes les nations se croisent et s'empressent, dans le grand amusement d'aller à la découverte, de s'ébattre en pays conquis, d'attraper des poulets, de faire main basse, dans les jardins, sur les salades et les poires. Des Russes déménagent les bouddhas et les vases dorés d'une pagode. Des Anglais ramènent à coups de bâton des bœufs capturés dans les champs. Des marins de la Dalmatie et d'autres du Japon, très camarades depuis une heure, font en compagnie leur toilette au bord du ruisseau. Et deux bersaglieri, qui ont attrapé un petit âne, en se pâmant de rire, s'en vont ensemble à califourchon dessus.

Cependant, le triste exode des paysans chinois, commencé depuis hier, se poursuit encore ; malgré l'assurance donnée  qu'on ne ferait de mal à personne, ceux qui étaient restés se jugent trop près et aiment mieux fuir. Des familles s'en vont tête basse : hommes, femmes, enfants, vêtus de pareilles robes en coton bleu, et tous, chargés de bagages, les plus bébés même charriant des paquets, emportant avec résignation leurs petits oreillers et leurs petits matelas.

Et voici une scène pour fendre l'âme. Une vieille Chinoise, vieille, vieille, peut-être centenaire, pouvant à peine se tenir sur ses jambes, s'en va, Dieu sait où, chassée de son logis où vient s'installer un poste d'Allemands ; elle s'en va, elle se traîne, aidée par deux jeunes garçons qui doivent être ses petits-fils et qui la soutiennent de leur mieux, la regardant avec une tendresse et un respect infini ; sans même paraître nous voir, comme n'ayant plus rien à attendre de personne, elle passe lentement près de nous avec un pauvre visage de désespoir, de détresse suprême et sans recours - tandis que les soldats, derrière elle, jettent dehors, avec des rires, les modestes images de son autel d'ancêtres. Et le beau soleil de ce matin d'automne resplendit tranquillement sur son petit jardin très soigné, fleuri de zinnias et d'asters ... »

Pierre Loti, Les derniers jours de Pékin (extraits).

 À suivre 

Commentaires

Lu ! Ils n'étaient pas tendres les envahisseurs venus aider, à cette époque....
Je ne savais même pas qu'en 1900, il existait déjà des cuirassés.
Tu vois, toute une éducation histoire/géographie à faire pour moi (entre autres).

J'attends la suite !!!!

Écrit par : Christine | lundi, 12 avril 2010

@ Je suis contente que cela te plaise !

Écrit par : tinou | lundi, 12 avril 2010

Les commentaires sont fermés.