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lundi, 30 janvier 2012

26. Bilan d'une décennie -85-

Revenons à des choses plus réjouissantes. Nous sommes donc en mai 2009 et je suis à Marrakech pour une petite semaine. Si un jour vous avez l'occasion d'y séjourner, ne manquez surtout pas la visite du palais de la Bahia !

Ce palais fut construit à la fin du XIXe siècle pour le compte du grand vizir Ahmed ben Moussa, dit Ba Hmad. C'est dans cet endroit somptueux qu'il logea ses quatre femmes et ses 24 concubines.

Comme vous allez le constater dans le diaporama qui suit, ce lieu est un véritable enchantement.

Quid du programme de restauration qui devait débuter en 2011 ?

Bonne promenade :


Palais de la Bahia par cheztinou

08:22 Publié dans Voyages | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : palais, bahia, marrakech, maroc

25. Le mauvais chemin -4-


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Il faisait doux, Marcel  n’était pas pressé de rentrer chez lui. Et contrairement à son habitude, il changea de trajet, il passa par les bords de la Loire, à l’opposé de son lieu d’habitation, histoire de voir les pêcheurs. Pendant ce temps, le petit Louis était arrivé depuis déjà un bon moment place Rabelais et toujours pas de Marcel en vue. Il commençait à s’inquiéter, il ne savait pas quoi faire. Son père lui avait dit d’attendre, oui, mais combien de temps fallait-il qu’il reste là ? Il aperçut soudain un cycliste qu’il reconnut. C’était un employé de la cité qui travaillait avec Marcel. Il alla au devant de lui et lui demanda s’il savait où était ce dernier.

« Marcel ? Ça fait déjà un bon moment qu’il est parti ! Il doit être chez lui ou au bistro à l’heure qu’il est ! Pourquoi ? »

Le gamin lui expliqua les raisons de sa présence ici et l’autre eut soudain un air grave.

« Mince, dit-il ça sent mauvais tout ça ! Reste là, moi de mon côté je vais voir si je ne le vois pas dans le coin ». Il repartit en sens inverse.

Marcel venait de rejoindre le boulevard Tonnellé. Il longea l’hôpital Bretonneau puis  atteignit bientôt sa rue… Au moment où il tournait, il aperçut alors l’arrière noir de la traction devant sa porte. Mais c’était déjà trop tard. Le conducteur de l’autre traction l’avait vu arriver et la voiture se positionna juste derrière lui. Deux hommes en sortirent brusquement et se précipitèrent sur Marcel qui tomba de vélo. Ils le jetèrent sans ménagement dans la voiture qui redémarra aussitôt et disparut bientôt. L’autre traction klaxonna et bientôt on vit deux hommes en imperméable sortir. Ils soutenaient la pauvre mère de Marcel, le visage ensanglanté et la poussèrent à l’intérieur de la voiture. Marcel fut conduit dans les locaux de la Gestapo. Là on le tortura pour obtenir des informations. Quelles informations aurait-il bien pu fournir ? Il ne connaissait rien du véritable réseau .Son arrestation était arrivée à la suite d’une lettre anonyme. Quelques semaines plus tard Marcel fut fusillé.  Sa mère fut envoyée quelque part loin, très loin de chez elle, dans un endroit d’où peu revinrent. Elle mourut dans le camp de Mathausen en 1944. Depuis, tous les ans à la date anniversaire de la mort de Marcel, les anciens de la cité déposent une gerbe de fleurs devant la maison, sous la plaque qui a été  scellée dans le mur de la maison et qui rappelle aux plus jeunes les misères qu’ont vécues les générations précédentes.

FIN

dimanche, 29 janvier 2012

24. Le mauvais chemin -3-


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C’était en fin d’après midi. Tout était bien calme dans le quartier. Dans le café quelques vieux discutaient à une table et le patron, tout en essuyant les verres, écoutait leur conversation. Soudain deux tractions noires passèrent au ralenti devant le café. A l’intérieur de chacune d’elles il y avait trois hommes, la mine sombre, le regard à moitié caché par un feutre. L’une des voitures s’arrêta le long du trottoir un peu plus loin tandis que l’autre continuait sa route.TRACTION.JPG

« Ça ne présage rien de bon » se dit en lui-même le cafetier. Les vieux avaient regardé passer les tractions. Eux aussi avaient reconnu les voitures de la Gestapo. Une espèce d’angoisse saisit alors tous les clients qui finirent rapidement leur verre et rentrèrent bien vite chez eux. Environ une demi-heure plus tard, la porte du café s’ouvrit et le patron reconnut le vieux Michaud, un retraité de la cité. Sa maison était contiguë à celle de Marcel. Il était tout essoufflé, sans doute avait-il marché très vite. Lui qui ne pouvait se déplacer sans sa canne, il avait dû faire un réel effort car il était en sueur. Il s’avança jusqu’au comptoir et bredouilla :

« La Gestapo est chez Marcel ! J’ai entendu sa mère crier et j’ai vu la voiture dans la rue… Ils sont en train de tout casser à l’intérieur de la maison. Je suis passé dans le jardin par derrière pour sortir. Il faut prévenir Marcel qu’il ne rentre pas chez lui car ils l’attendent. » Comment faire ? Marcel n’était pas encore rentré du boulot ; il revenait toujours aux environs de vingt heures et il était déjà dix-neuf heures trente. Le patron eut alors une idée :

« Vous connaissez le chemin qu’emprunte Marcel quand il revient ?

—    Oh  oui, ça c’est facile vu qu’il a ses habitudes de bistro. Il  prend par la place Rabelais , puis la rue du Plat d’Etain.

—    Bon, dit le patron, on va envoyer quelqu’un pour tâcher de l’intercepter.»

Il sortit dans la cour et aperçut son fils en train de nettoyer son vélo.

« Louis, viens là deux minutes. J’ai à te parler.» Il lui expliqua la situation et le chargea d’aller au devant de Marcel avec son vélo.

« Tu vas jusqu’à la place Rabelais et si tu ne l’as pas croisé avant, tu attends. Tu as compris ?

—    Oui, oui, » fit le gamin, ravi qu’on lui confie une telle mission d’importance. Il prit aussitôt son vélo et fila en direction de la rue du plat d’Etain.  Au même instant Marcel venait de quitter l’entrepôt.

A suivre

23. La maison de mon enfance -2-


podcast

En 1944 mon père s’engagea dans la marine afin d’éviter le STO. Après une année passée au camp de Mimizan dans les Landes, il embarque fin 1945 à bord du  Jules Verne, ancien navire-amiral de la 2e flottille de sous-marins transformé en août 1945 en navire atelier léger pour l’Indochine.

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De ce voyage dans des pays lointains, il rapportera une foule d’anecdotes qui éveillèrent très certainement en moi l’envie de voyager plus tard comme lui vers d’autres horizons.

Il revint en juillet 1947 et épousa ma mère en avril de l’année suivante. Puis, un beau matin de mars 1949, je fis mon apparition.

Mon père travaillait dans une entreprise qui fabriquait des machines à coudre à Vernou. Une estafette le prenait chaque matin et le raccompagnait le soir. Quant à ma mère, ma pauvre mère, elle quitta son emploi de secrétaire pour celui de serveuse au service de mes grands-parents. Il était évident qu’elle n’était pas faite pour ce métier, mais elle était tellement amoureuse de mon père !

Évoquer le souvenir de ma mère reste toujours pour moi extrêmement douloureux, même après toutes ces années. Je n’ai pas su comprendre sa souffrance quand il était encore temps.

Je grandis donc, entourée des mes parents et mes grands-parents dans cette grande maison de deux étages. Une enfance très solitaire…

En mai 1960 mon grand-père décéda et mon père quitta son emploi pour reprendre la succession du café. En 1964 il entama des travaux de rénovation et acheta la maison.

Bien souvent, je mettais la main à la pâte quand ma mère était souffrante. Ainsi, je faisais l’ouverture du café  le matin à 6h, avec mon père ou bien, après la fermeture, je balayais la salle du café au sol jonché de mégots. C’est sans doute de cette période que m’est venue l’habitude d’être matinale.

Je garde néanmoins un bon souvenir de cette époque de ma vie qui m’a permis de côtoyer toutes les classes sociales, du simple ouvrier au directeur, en passant par les employés de bureau, les cadres, les marchands de bestiaux, les bouchers, les éboueurs, les gaziers, les plombiers zingueurs,  les métallos, les retraités souvent grincheux, les étudiants en médecine, leurs professeurs, les piliers de comptoir, j’en passe et des meilleurs probablement. 

Les premiers pas de Peggy se firent dans la cour de la maison :

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En 1975 tout s’arrête alors. Mon père vend le fond de commerce. À sa mort, en 1999, j’hérite donc de la maison.

Ce n’est pas à vous qui êtes certainement propriétaires de votre demeure que j’apprendrai qu’une maison, ça se bichonne, d’autant plus qu’elle est ancienne. Or pour cela, il faut de l’argent et moi, cigale sur terre, je n’en ai pas. C’est la raison qui m’amène donc à me séparer de ce bien.

Il y a quelques mois, j’ai fait le tour du propriétaire des lieux. Je n’y étais pas  retournée depuis 1975 et ce fut un véritable choc de revoir l’endroit où j’avais grandi. Tout avait été modifié, embelli certes, mais je ne retrouvais plus mes repères.

Oui, il est temps, grand temps de tourner la page … sans regrets … ou si peu ! Les murs raconteront désormais une nouvelle histoire. 

samedi, 28 janvier 2012

22. Le mauvais chemin -2-

podcast

Dans le journal du lendemain, un article mentionnait le sabotage d'une voie ferrée durant la nuit. Les dégâts, sans être importants, bloquaient cependant le trafic des marchandises pendant un certain temps. Le cafetier repensa alors aux propos de Marcel, la veille au soir, et il fit tout de suite le rapprochement. Il n'avait pas tort... En quittant discrètement sa maison, Marcel était allé rejoindre deux acolytes de boulot, deux têtes brûlées comme lui et qui voulaient, à leur façon, résister à l'occupant. Ils auraient pu intégrer un réseau de résistance, il y en avait un dans la région. Mais on n'avait pas voulu d'eux, les responsables les ayant jugés trop dangereux pour les autres. Donc ils opéraient tous les trois en marge du groupe existant. De plus ils connaissaient très bien le réseau ferroviaire pour y travailler quotidiennement et quand ils en avaient l'opportunité, ils dérobaient à l'entrepôt le matériel nécessaire à leurs actions. Le soir même, Marcel se rendit au café après son travail. Personne ne lui prêtait attention et cela le contraria. Il avait envie de crier:

« Eh les gars! C'est moi qui ai fait sauter la voie ferrée cette nuit! Comme ça, les Boches, ils peuvent plus nous piquer ce qui est à nous! » 

Il passa commande d'un petit blanc. Le patron le servit au comptoir et lui dit tout bas:

« Retrouve-moi dans la cour dans dix minutes. »

Puis il prit son panier à bouteilles et fit mine d'aller chercher du vin à la cave. Marcel but tranquillement son verre et quelques instants plus tard se dirigea vers les toilettes situées dans la cour. Les deux hommes se retrouvèrent face à face.

« C'est toi qui as fait sauter la voie cette nuit ? 

— Oui, ah ! Enfin quelqu'un qui porte de l'intérêt à ce que je fais avec mes potes !

— Là n'est pas le problème Marcel. Tu sais très bien que les Allemands sont de plus en plus sur la défensive depuis qu'ils perdent la guerre sur le front de l'est. Tu parles beaucoup trop. Tu dois te méfier de tout le monde, même de tes voisins les plus proches ! Tu te rappelles quand les Allemands sont arrivés dans la région ? J'étais mobilisé et j'ai dit à ma femme et à mon fils d'aller se réfugier à Bayonne. Quand ils sont revenus, la maison avait été cambriolée. Ce ne sont pas les Allemands qui nous ont volés, non, non, ce sont bel et bien les voisins ! Tu ne me crois pas, hein...et pourtant c'est vrai. L'autre jour, ma femme est allée chez madame P... pour  faire retoucher une robe et qu'est-ce qu'elle a vu sur la table de la cuisine ? Une de nos petites cuillers en argent, elles étaient facilement reconnaissables car elles étaient gravées. Elle a fait celle qui n'avait rien vu, mais tu parles d'un choc ! Alors, quand je te dis de faire gaffe, j'ai mes raisons. Et puis, pense à ta mère ! Qu'est-ce qu'elle deviendrait s'il t'arrivait malheur ? » 

Marcel écoutait, l'air penaud comme un gamin qui se fait réprimander par son instituteur. Au fond de lui, il savait que le cafetier avait raison. Il avait manqué un père à Marcel, le sien était mort accidentellement quand il était tout jeune et sa mère n'avait pas eu l'autorité suffisante pour apprivoiser ce jeune chien fou qu'il était devenu. Il jura sur la tête de sa mère de se contrôler, de boire un peu moins... Cela dura quelques mois, puis les mauvaises habitudes reprirent le pas et de nouveau il joua les fanfarons. Mais entre temps la situation s'était modifiée. Le réseau des résistants avait mené des actions d'ampleur où il y avait eu des soldats allemands blessés et tués. Des otages français avaient alors été fusillés. Le journal continuait d'annoncer épisodiquement des sabotages ferroviaires et Marcel de se vanter à haute voix que c'était lui et ses potes les instigateurs ! Jusqu'au jour où...

A suivre