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mercredi, 19 janvier 2011

24. Jean Dutourd nous a quittés

jeandutourd.jpg.jpg« Aimer, c'est être embêtant, tatillon, exigeant, c'est vouloir qu'on soit mieux qu'on est, c'est empoisonner l'existence de l'être qu'on aime»

Jean Dutourd est décédé le 17 janvier à l'âge de 91 ans. Romancier, essayiste, chroniqueur, il avait été élu à l'Académie Française en 1978.

Très longtemps il participa quotidiennement à l'émission radiophonique des "Grosses têtes" sur RTL. Son livre, "Au bon beurre", lui valut le prix Interallié en 1952. Plus tard, en 1980,ce roman fut adapté à la télévision par Edouard Molinaro. Les affreux Poissonnard (nom de famille des crémiers) furent interprétés par Roger Hanin et Andréa Ferréol. En voici un extrait :

Si vous ne trouvez pas le DVD, vous pouvez toujours lire le roman.aubonbeurre.jpg.jpg

Son décès est passé pratiquement inaperçu dans les médias. Un oubli qu'il convient de réparer au plus tôt !

Vous trouverez la liste de son œuvre littéraire dans le lien suivant ICI. 

23. Retour à Carthage

Je continue mes recherches généalogiques et il y a peu,  le hasard m’a conduite jusqu’à Carthage, en Tunisie. J’ai visité le site archéologique lors de mon voyage. Il faut bien dire que c’est extrêmement décevant. Il faut avoir une imagination très développée pour pouvoir se représenter le lieu tel qu’il devait être. D’autre part, les ruines étant très proches de la résidence officielle du président de la république, il est interdit de photographier dans l’axe de la propriété. Enfin, ce jour-là, le ciel était gris. En conclusion, pas de photos !

Mais revenons à la généalogie et comment mes recherches —aussi étrange que cela puisse paraître —– m’amènent à Carthage.

Nous sommes à la période du Haut Moyen-Age. En remontant progressivement, je suis arrivée à Sigebert MÉROVINGIEN( numéro sosa 1 172 120 256 745 088 dans ma généalogie), né vers 535, décédé à Villy-en-Auxois (21) en 575. Il était roi de Reims et d’Austrasie. Il était le fils de Clotaire Ier MÉROVINGIEN et d’Arégonde de THURINGE.

En 566 Sigebert  épouse Brunehaut de HISPANIA, fille d’Athanagilde de HISPANIA (roi des Wisigoths d’Espagne) et de Galswinthe VANDALE.

 Nous y voilà ! Les Vandales arrivent

Cette Galswinthe VANDALE s’est mariée en 533 et est décédée en 589. Elle était la fille de Hoamer VANDALES (né vers 490, décédé vers 533) et de Gossana de WISIGOTHIE (ascendance inconnue).

Les parents de Hoamer sont inconnus, mais on sait que son grand-père était Hunéric VANDALES.

Hunéric VANDALES fut roi des Vandales de 477 à 484 (année de sa mort). Il avait épousé Eudocia Placidia de ROME, fille de l’empereur romain Valentinius III Flavius de ROME et de Licinia Eudoxia FLAVIA.genseric.jpg.jpg

À la génération suivante on trouve Genséric VANDALES. Genséric était le demi frère du roi Gundéric. Tout laisse à penser que Genséric se débarrassa de son frère, qui mourut dans des circonstances mystérieuses en 427, pour prendre le pouvoir. Un pouvoir qu’il garda pendant près d’un demi siècle et qui l’amena jusqu’à Carthage. C’est là qu’il trouva la mort le 25 janvier 477.

Que de rumeurs ont couru sur les Vandales ! D’ailleurs ce nom propre est entré dans le vocabulaire courant sous la forme de l’adjectif  et du nom vandale, désignant une personne qui saccage tout par bêtise ou ignorance.

Enfin, si l’on remonte encore un peu dans le temps, on trouve Godégisel VANDALES, né vers 359 sur les rives du lac Balaton (en Hongrie) et mort durant une bataille livrée sur le Limes, à Trèves (Allemagne) en 406.

 Ainsi donc, partis de l’Europe centrale, ces Vandales iront se fixer en Afrique du nord et finiront par se mélanger à la population locale. Quelle extraordinaire mixité !

Ce qui m'amuse beaucoup, c'est que je peux ainsi appeler ma fille petite Vandale !Mais je pense que tout cela vous ennuie prodigieusement. Aussi, pour me faire pardonner, voici un petit diaporama sur la Tunisie.

mardi, 18 janvier 2011

22. Une odeur de jasmin

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Il souffle dans l’air comme un parfum de jasmin, qui nous vient de l’autre côté de la Méditerranée et qui me rappelle subitement mon séjour en Tunisie.

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Le petit vendeur de jasmin : il s’appelle Mohamed et chaque jour, après la sortie de l’école, il fait le tour des hôtels de Monastir pour vendre ses petits bouquets de jasmin, préparés par sa mère.

C’était en avril 2003, je n’étais encore jamais allée dans les pays du Maghreb et j’avais choisi la Tunisie car c’était un voyage que mon mari et moi avions prévu de faire en 1972, voyage qui n’a jamais abouti.  

Ce matin, j’ai donc repris mes deux albums de photo, photos argentiques et les souvenirs sont aussitôt revenus, intacts.

J’étais partie une semaine à Monastir. De là, j’avais fait des excursions : Sousse, Kairouan, Tunis, Sidi Bou Saïd, Carthage, Nabeul, Hammamet.

Lors de cette semaine je m’étais liée d’amitié avec une jeune femme qui habitait la région parisienne. Elle était accompagnée de sa mère. Nous étions allées ensemble visiter le musée des mosaïques à Sousse.

Nous avons continué à nous écrire pendant quelques années, puis nous nous sommes un peu perdues de vue.

Ce matin donc, j’ai recherché dans mon foutoir un vieil agenda  dans lequel j’espérais retrouver, sinon son téléphone, du moins son adresse. Heureusement que je garde tout. Bingo !

Je téléphone aussitôt :

— Allo, Linda, c’est Danielle. Tu te souviens, nous étions ensemble à Monastir.

— Ah, Danielle de Tours ! Justement je pensais à toi et à notre rencontre en Tunisie …

Et voilà, le contact est renoué. Elle n’est toujours pas équipée d’un ordinateur — ça c’est bête — mais nous allons reprendre la correspondance.

Enfin, souhaitons aux Tunisiens tout le courage possible. Le chemin vers la démocratie est semé d’embûches. Rien n’est encore acquis !

lundi, 17 janvier 2011

21. Made in China

Un lecteur m'a fait parvenir cette photo il y a quelques jours. Il possède un album de photos de voyage ayant appartenu à Pierre Loti et voulait savoir si je pouvais reconnaître le lieu où la photo avait été prise.

Bien évidemment ... non !

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Je la trouve touchante, cette photo, datant du début du XXe siècle, avec ces enfants qui devaient être étonnés par cet homme qui les fixait ainsi pour l'éternité ! Le petit garçon a le crâne rasé. Il doit avoir dans le dos la longue queue traditionnelle.

On peut sans excès supposer que c'est Loti lui-même qui a photographié cette scène de vie, quelque part en Chine, lors de son séjour fin 1901, ou bien au printemps 1902.

dimanche, 16 janvier 2011

20. Horreur et fascination -6-


podcast
Nous sommes toujours à Bénarès en compagnie de Pierre Loti. Après la visite des rives du Gange au lever du soleil, voici maintenant une extraordinaire description des lieux au coucher du soleil :

 Sur le Gange en hiver, par un soir gris. La brume des fins de jour monte du vieux fleuve sacré et ternit avant l’heure le soleil qui va s’éteindre. Bénarès, en silhouette prodigieuse de temples penchés et de palais croulants, se dresse devant l’Ouest encore lumineux […]

Et d’un bout à l’autre de cette ville, qui s’éploie sur la rive en croissant superbe, suivant la courbe de son fleuve, des escaliers en granit forment comme un immense piédestal, descendent de là-haut, de la région où les hommes ont leur demeure, vers la zone profonde et les eaux vénérées.

On les voit ce soir jusqu’aux dernières marches, les grands escaliers, jusqu’aux assises qui ne se découvrent que dans les années de malheur, et dont l’apparition signifie misère et famine. Ils sont vides, à cette heure du jour, ces escaliers majestueux où, jusqu’à midi, s’étageaient en foule les marchands de fruits, les marchands de gerbes pour les vaches sacrées, surtout les marchands de ces bouquets et de ces guirlandes que l’on jette en hommage au vieux fleuve adoré ; mais les innombrables parasols de sparterie qui abritaient tout ce monde restent là, plantés à demeure sur des hampes, et très penchés vers le levant pour le soleil du matin ; des parasols sans plissures, ressemblant à des disques de métal, et tous les granits qui servent de base à la ville en sont couverts, à perte de vue ; on dirait un champ de boucliers.

Un terne crépuscule s’annonce, et il fait subitement froid. En venant à Bénarès, je n’avais pas prévu des ciels gris et des aspects d’hiver.

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Ma barque, au gré du courant, chemine en silence, rasant les bords, sous l’oppression des grandes masses sombres.

En un recoin sinistre de la berge, parmi les éboulements de palais, sur la terre noirâtre et la vase, il y a trois petits bûchers auxquels des hommes de mauvais mine, en haillons, s’efforcent de mettre le feu ; trois petits bûchers qui fument et ne veulent pas flamber ; ils sont de forme inquiétante, longs et étroits : bûchers de cadavres. Des morts y sont couchés, chacun dans le sien, les pieds vers le fleuve ; en s’approchant, on distingue, parmi les morceaux de branches, des orteils enveloppés de linge qui débordent et qui se dressent. Comme ils sont petits, ces bûchers ; il faut donc si peu de bois pour faire brûler un corps !

— Des bûchers de pauvres, m’explique un Hindou, mon batelier. Ils n’ont pas eu de quoi en acheter davantage, et c’est du mauvais bois tout humide.

Cependant l’heure de Brahma est venue et, le long du fleuve, la puissante vie religieuse du soir va commencer. Par tous les escaliers descendent les brahmes, drapés dans des voiles ; ils viennent jusqu’en bas chercher l’eau sainte, pour les ablutions et pour les rites auxquels leur caste oblige ; les marches de granit, qui étaient si désertes, se peuplent en silence ; […]

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Dans le recoin des morts, près des trois bûchers fumants, il y a deux autres formes humaines empaquetées de mousseline et à demi plongées dans le fleuve, chacune reposant sur une frêle civière ; ils prennent leur bain dans l’eau sacrée, ceux-là, tout comme les vivants d’à côté, leur bain suprême, avant d’être déposés sur les piles de bois que l’on commence aussi à dresser pour eux. 

Un peu au-dessus des bûchers, sur la frise d’un vieux palais qui a depuis longtemps roulé au fleuve, des gens, cinq ou six au plus, se tiennent accroupis, la tête enveloppée d’un voile, et semblent regarder avec attention comme le fakir : les parents de ceux que l’on brûle.

Maintenant, au sommet des gigantesques escaliers, une recrue nouvelle pour les bûchers fait son apparition ; un cinquième cadavre débouche là-haut d’un couloir d’ombre qui est une rue, et s’achemine vers le vieux Gange, où sa cendre sera jetée. Sur des branches de bambou liées en brancard, six hommes de basse caste, dépenaillés et demi-nus, l’amènent les pieds en avant, presque debout, tant la pente est raide ; personne ne suit, personne ne pleure, et des enfants, qui descendent aussi pour se baigner, comme s’ils ne voyaient rien, sautent gaiement alentour […]

Une mousseline rose, à grands dessins éclatants, enveloppe ce cadavre qui arrive, et des fleurs blanches de gardénias, des fleurs rouges d’hibiscus sont attachées à ses reins. C’est une forme de femme ; ces fleurs, du reste, suffisaient à le faire prévoir ; mais l’étoffe légère la révèle admirable, malgré l’affaissement glacé. « Une fille de riches, me dit le batelier, voyez le beau bois qu’on lui apporte. »

Il est bientôt l’heure du coucher des oiseaux qui, aux Indes et surtout à Bénarès, prend toujours tant d’importance ; des nuées de corbeaux, criant la mort, des nuées de pigeons vont et viennent dans le ciel pâle, et chaque pyramide de temple a son tourbillon spécial, qui évolue en cercle alentour, à la manière des pierres de fronde. La brume du fleuve, qui s’épaissit toujours, est de plus en plus froide, et l’odeur des décompositions traîne plus lourdement dans l’air du soir […]

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Et je reviens vers les bûchers… C’est le vrai crépuscule à présent, et les oiseaux ont fini de tournoyer dans l’air ; sur toutes les corniches de temples ou de palais, ils se sont posés en rang pour la nuit et forment de longs cordons qui frémissent encore, agités de derniers battements d’ailes […]

J’arrive trop tard au recoin des morts. Un grand bûcher flambe, un bûcher de riche, d’où s’échappent des étincelles et des flammes en tourmente ; elle est au milieu, la jeune fille, et on ne voit plus rien d’elle, rien qu’un lugubre pied, un seul, qui a les doigts écartés étrangement comme par un excès de souffrance et qui se découpe en silhouette noire devant la lueur du feu.   

Cependant, de ces deux formes humaines prostrées sous des voiles de pauvre, qui regardaient impassiblement brûler le tout petit mort du haut d’une pierre de frise, l’une se lève, se penche au-dessus de lui, se découvre le visage, pour voir de plus près et mieux. Et la lueur du bucher de la jeune fille éclaire en plein ses traits : une vieille femme décharnée.

« Est-il bien tout brûlé, au moins ? » semble-t-elle dire. Elle est très vieille, c’est quelque grand-mère, plutôt que la mère […] Ses pauvres yeux expriment l’inquiétude de n’avoir pas eu assez d’argent pour lui acheter le bois qu’il aurait fallu, la crainte que les impitoyables brûleurs n’aillent jeter à l’eau des fragments encore reconnaissables. Elle se penche à nouveau, regarde anxieusement, à la lueur du bûcher des riches, tandis que le brûleur, pour lui montrer qu’il n’y a plus rien, remue avec une branche les restes des tisons noirs qui sont par terre. Alors elle fait un signe :

« Oui, c’est bien ; allez, vous pouvez jeter au fleuve. »

Avec une pelle en bois on jette au fleuve les derniers tisons noircis, les restes du bûcher de misère.

Et, sur le bûcher voisin, le pied de la belle jeune fille, le pied aux doigts écartés tombe enfin dans les cendres.» livre.jpg.jpg

Voilà, je m’arrête ici dans la transcription du texte. Vous pouvez toujours retrouver l’intégralité du récit dans le livre de Pierre Loti : « L’Inde (sans les Anglais) »

Je ne vous cacherai pas que j’appréhende un peu cette visite qui sera en fin de voyage. J’aurai l’occasion de vous en reparler à mon retour.