lundi, 23 novembre 2009
415. Les villes fantômes -3-
Après la petite virée dans la Pampa argentine, je vous propose ce matin un retour direct vers le continent européen. Direction un archipel ! Je vous vois déjà imaginant une mer vert émeraude bordée de cocotiers. Prévoyez tout de même une doudoune, vous comprendrez pourquoi bientôt.
Nous voici en approche de l’archipel du Svalbard. À vos mines déconfites, je suppose que vous ne connaissez pas. C’est un archipel norvégien situé dans la mer de Barents, plus proche du pôle nord que du continent. La température atteint tout de même les 6° en plein juillet !
Sur la plus grande des îles, le Spitzberg, se trouve la ville fantôme de Pyramiden. Ce nom a été choisi en raison de la montagne qui se situe à l’arrière et qui a la forme d’une pyramide.
Cité minière construite en 1910. Elle fut vendue en 1927 à l’Union Soviétique qui continua l’exploitation des gisements houillers.
La ville comptait environ mille habitants. Il y avait les logements des ouvriers, un hôtel, un stade et divers lieux de détente (enfin je suppose !).
La crise charbonnière amena peu à peu le déclin et l’URSS décida l’abandon du site.
Le 10 janvier 1988, les habitants quittèrent donc les lieux qui, depuis, sont restés en l’état d’origine.
Seuls sept gardiens veillent sur le site en période estivale. Ce lieu attire bon nombre de touristes et un projet de réhabilitation est en cours. Un hôtel pourrait voir le jour prochainement !
BONNES VACANCES
Photo de Gard Gitlestad :
Sur cet archipel on peut voir également d’autres cités minières à l’abandon : c’est le cas de Colesbukta, Grumantbyen et Advent City.
03:05 Publié dans Ici ou là | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ville, fantôme, pyramiden, norvège
dimanche, 22 novembre 2009
414. Les villes fantômes -2-
Après l’Azerbaïdjan, envolons-nous maintenant de l’autre côté de l’Atlantique, en Argentine et plus précisément à Villa Lago Epecuen.
Je n’ai pas trouvé de carte où elle figure. Je l’ai donc située approximativement, c’est entre Buenos Aires et Santa Rosa (le gros rond bleu ciel).
Cette ville, située sur le lac Epecuen, était une station de cure thermale qui comptait plus de 250 hôtels et centres de soins. L’eau vint à manquer peu à peu et des travaux de remblaiement furent entrepris pour en rajouter dans le lac.
Mais le 10 novembre 1985 le mur de soutènement de 3,5m de hauteur a brusquement cédé, libérant ainsi toute l’eau et engloutissant la ville sous plus de 2 mètres d’eau.
Les habitants se sont alors réfugiés dans la ville voisine de Carhue.
Et depuis… Voici le triste spectacle !
Photo de Mariano Perez :
Enfin voici une vidéo de la ville en avril 2009 :
07:03 Publié dans Ici ou là | Lien permanent | Commentaires (2)
samedi, 21 novembre 2009
413. Célestine Chardon -3-
LA VIE BIEN ORDINAIRE DE CÉLESTINE CHARDON
Chapitre 3
En se réveillant le lendemain matin, Célestine réalisa soudain qu'elle n'allait pas à son travail. Cette idée la décontenança un peu, mais en même temps, elle se sentit envahie par une effervescence peu commune. Elle était désormais libre d'organiser ses journées comme elle le souhaitait... Cette idée de se prendre en charge sans avoir à répondre de ses faits et gestes à un supérieur la ravissait et lui faisait peur tout à la fois. Comment allait-elle organiser son temps ?
Elle se connaissait bien et savait qu'en dehors du travail, elle ne bougeait pratiquement jamais de chez elle. Mais maintenant, elle n'avait plus rien à faire.... PLUS RIEN À FAIRE ! Elle sentit une angoisse qui montait peu à peu. Elle quitta son lit et se dirigea dans la cuisine pour se préparer un café. Pendant que la cafetière éructait doucement, elle alla à la fenêtre humer l'air matinal. Six heures du matin !
Le ciel commençait à rosir au-dessus des toits. Dans la rue quelques personnes se hâtaient vers une destination inconnue. Elles marchaient vite comme si elles craignaient d'être en retard... Célestine laissa la fenêtre entrouverte, puis se servit un café dans son grand bol jaune et s'assit sur le bord de la chaise. Elle se releva soudain comme prise d'une inspiration, alla ouvrir le buffet de la salle à manger et en sortit un carnet tout neuf, un crayon de bois, une règle plate et une gomme. Puis elle revint s'asseoir à la table. Un sourire illuminait son visage.
— Bon, dit-elle à haute voix, il faut que je m’organise. Elle ouvrit le carnet à la première page, compta le nombre de carreaux verticalement et, apparemment satisfaite du résultat obtenu, elle tira des traits horizontaux tous les deux carreaux, avec une extrême application. Puis elle tourna la page et refit la même chose sur le deuxième feuillet. Elle prépara ainsi une bonne dizaine de feuilles. Elle s'aperçut qu'elle avait oublié de boire son café qui devait être tiède à présent. Elle en avala une gorgée et se releva en direction du buffet. Cette fois-ci, elle prit dans le tiroir un stylo à encre. Revenue à sa place, elle écrivit avec beaucoup d'application en haut de la première page: " Juin 2002". Dans la rangée suivante elle inscrivit samedi 1er, puis en dessous, dimanche 2 et ainsi de suite jusqu'au samedi 15.
Le mot samedi avait fait tilt dans sa tête et tout en continuant à remplir les bandes, elle pensa que c'était le jour du marché autour des Halles. Cette idée la remplit d'une grande joie car on était justement un samedi ! Elle allait pouvoir enfin faire son tour de marché, chose qui lui était impossible de faire auparavant sauf durant la période des vacances.
Toute émoustillée à l'avance, Célestine continua d'inscrire les dates sur son petit carnet et s'arrêta à l'endroit où les traits finissaient. Coïncidence ? Cela tombait juste sur le mois de décembre.
Au dehors la ville s'animait peu à peu...Elle jeta un coup d'œil par la fenêtre. En face, le cafetier lavait sa terrasse à grande eau et installait les tables et les chaises sur la petite partie du trottoir qui lui était allouée. Il l'aperçut et fit un grand signe de la main:
— Bah alors Célestine, pas encore partie au boulot ce matin ?
— C'est fini le boulot, répondit-elle en souriant malicieusement. Terminé depuis hier !
— Pas possible, déjà à la retraite ? Ah, mais ça s'arrose une telle nouvelle !
— Oui, oui, je passerai vous voir dans la journée, promis !. Et elle referma la fenêtre.
Elle aimait bien cet homme qui était installé depuis déjà au moins cinq ans dans cet endroit. Il avait environ une trentaine d'années et il était toujours prêt à rendre service à ses voisins. Sa femme était une belle brune, mince et élancée, très discrète, qui renvoyait à Célestine l'image de sa propre mère. Le couple avait une petite fille, qui venait tout juste d'avoir six ans. En les voyant vivre au quotidien, Célestine songeait souvent à sa propre enfance. C'était il y a bien longtemps déjà...une autre époque, un autre lieu.
Ses parents aussi tenaient un bar tabac. La maison était grande avec ses deux étages, elle faisait l'angle d'un grand boulevard agrémenté de platanes et d'une rue interminable dont on ne voyait pas le bout...
À suivre
09:53 Publié dans Petites nouvelles de rien du tout | Lien permanent | Commentaires (4)
412. Les villes fantômes -1-
Vous connaissez tous Oradour-sur-Glane, en France, la plus tristement célèbre ville fantôme de France, rayée brusquement de la carte en juin 1944 après le passage d'une section de SS ?
Il existe ainsi dans le monde des villes fantômes où toute présence humaine a disparu pour des raisons variables. Je vais vous en proposer quelques unes au cours des prochaines semaines.
Aujourd'hui, voici la ville d'Agdam, située en Azerbaïdjan. Cette jolie ville comptait 160 000 habitants. En juillet 1993 un conflit éclate entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan.
Les habitants fuient à l'arrivée des soldats arméniens. Depuis cette date, ils vivent dans des camps de réfugiés à proximité.
Photo de Joao Leitao :
La ville a été entièrement saccagée et pillée. Elle est maintenant peu à peu envahie par la nature qui reprend ses droits.
En savoir plus ? ICI.
04:48 Publié dans Ici ou là | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ville, fantôme, agdam, azerbaïdjan
vendredi, 20 novembre 2009
411. Célestine Chardon -2-
LA VIE BIEN ORDINAIRE DE CÉLESTINE CHARDON
Tout en marchant en direction de son domicile, elle repensait à cet abonnement à un club de rencontres et elle était quelque peu sceptique. Elle ne s'attendait pas à ce genre de cadeau et d'ailleurs elle ne connaissait même pas l'existence de tels clubs. Cependant, au moment de la remise des renseignements par Melle Froju, elle avait pris soin de ne rien laisser paraître de son ignorance et elle avait même poussé l'audace jusqu'à s'exclamer :
— Oh quelle idée merveilleuse ! Justement j'avais pensé m'y inscrire ! Les grands esprits se rencontrent, n'est-ce pas ?
— C'est comme ça que j'ai connu mon mari, rajouta une vendeuse sur un ton à la fois sérieux et solennel qui amusa fort Célestine. Vous verrez, vous allez connaître plein de gens et vous allez vous faire des amis et peut-être irons-nous bientôt au mariage !
Rires plus ou moins moqueurs dans l'assistance.
Parfois Célestine repensait à ces quelques hommes qu’elle avait connus autrefois et elle aurait bien aimé savoir ce qu'ils étaient devenus. Étaient-ils mariés? Se souvenaient-ils encore d'elle ? Joseph était-il devenu médecin ? Était-il reparti vivre dans son Cameroun natal ? Ali avait-il ouvert une pharmacie à Casablanca? Yann pêchait-il toujours au large du Croisic ? Dieter devait probablement toujours travailler comme journaliste à Berlin... et Takis, oui Takis qui lui avait fait découvrir les petites tavernes de La Plaka à Athènes ou encore les bouges mal famés du Pyrée, était-il enfin devenu inspecteur de police comme il souhaitait ?
Elle était arrivée devant la porte de son immeuble. Elle grimpa tranquillement les trois étages pour atteindre enfin sa "caverne" comme elle aimait appeler son petit appartement sous les toits, composé de trois grandes pièces dont les fenêtres donnaient toutes sur une petite ruelle calme du vieux Tours. La porte grinça quand elle l'ouvrit. Les derniers rayons du soleil inondaient la pièce d'une chaleur printanière. Par la fenêtre laissée entrouverte, on entendait le chant du merle qui annonçait l'arrivée prochaine de la nuit...
— Théo, mon Théo ? Où es-tu brigand ? dit-elle en posant son sac sur le coffre dans l'entrée. Elle quitta ses chaussures et, pieds-nus, se dirigea dans la cuisine, le bouquet à la main.
Elle disposa les fleurs dans un grand vase et le déposa sur la table de la salle à manger. Elle resta quelques instants à contempler le résultat qui la remplit d'aise. Retournant dans la cuisine, elle se servit un grand verre d'eau du robinet, puis, prenant un cachet d’aspirine dans la boîte sur le buffet, elle avala le tout d'un trait.
— Ah, ça va mieux ! soupira-t-elle en reposant le verre dans l'évier.
Un miaulement plaintif lui fit baisser les yeux. C'est son chat, son Théo, son confident, son seul ami, celui qui l'écoute toujours avec attention, celui à qui elle peut tout confier de ses chagrins. Le chat, imperturbable, s'étira, bailla, vint se frotter contre sa jambe et se dirigea nonchalamment vers sa gamelle à moitié vide. C'est un joli chat gris et blanc, assez haut sur pattes. Célestine saisit alors le gros paquet de croquettes et remplit la gamelle.
— Tiens, mon petit bonhomme, viens reprendre des forces. Pensant à son propre dîner, elle ouvrit la porte de son réfrigérateur... Un air frais s'en échappa qui vint lui caresser le visage. Il n’y avait pas grand-chose à l’intérieur : trois malheureux yaourts aux fruits, un litre de lait, une plaquette de beurre à moitié entamée et une boîte de camembert.
Moue dépitée de Célestine qui, réflexion faite, n'avait soudain plus très faim et décida d'aller se coucher avant que le mal au crâne n'empirât. Elle se rendit dans la salle de bain et machinalement saisit la brosse à dents, couvrit la surface poilue d'une fine couche de dentifrice. C'est à ce moment-là que son regard croisa celui de l'autre, dans la glace accrochée au-dessus du lavabo.
L'autre "elle", une tête aux cheveux courts hirsutes où le gris prenait de plus en plus de terrain, des joues qui virent au cramoisi. Mais ce sont surtout les cernes sous les yeux qui la frappèrent le plus. Un énorme soupir vint alors emplir la petite pièce.
— Mais oui, ma vieille, c'est bien toi que tu vois dans la glace! lança-t-elle comme un défi à sa propre image.
Elle se sentit tout à coup envahie par un profond désespoir, un chagrin qu'elle puisa au plus profond d'elle même. Elle avait l'impression de se réveiller, de sortir d'un long sommeil qui aurait duré plus de quarante années, l'impression d'être une vieille Belle au Bois Dormant. Les larmes perlèrent au coin des yeux et glissèrent doucement le long de ses joues. Elle se sentit soudain très lasse.
— Allons ma fille, secoue-toi un peu ! Une page vient de se tourner, demain sera un autre jour !
D'un revers de main elle essuya ses yeux et après avoir éteint la lumière, vérifié que la porte d'entrée était bien fermée à clef, elle se rendit dans sa chambre. Par la fenêtre grande ouverte, elle aperçut la lune, toute ronde, qui semblait lui faire un clin d'œil.
— Oui, murmura-t-elle en se lovant sous la couette à carreaux, demain sera un autre jour, demain je commence une nouvelle vie, demain va naître une nouvelle Célestine, demain je rattrape le temps perdu... Rattraper le temps perdu, quelle idiotie...!
Et elle se mit alors à chantonner la chanson de Barbara :
" Le temps perdu ne se rattrape plus....dis au moins le sais-tu...que le temps qui passe ne se rattrape guère....que le temps perdu ne se rattrape plus...."
Au dehors un nuage est venu cacher la rondeur de la lune un bref instant. Chut ! Célestine s'est endormie....
À suivre
09:04 Publié dans Petites nouvelles de rien du tout | Lien permanent | Commentaires (2)