samedi, 27 août 2016
Jeu de mots, suite
Voici une nouvelle série à découvrir :
1.Extrait / Niveau / Avis
2. Espagne / Eau / Fort
3. Avion / Permis / Chien
4. Chemin /Guerre / Point
5. Lance / Cheval / Age
6. Judo / Bec / Sang
7. Casser / Terrestre / Pâté
8. Panique / Ventre / Bleue
9. Douche / Fer / Tringle
10. Armoire / Faculté / Préparateur
J'attends vos propositions !
21:00 Publié dans Correspondance | Lien permanent | Commentaires (4)
jeudi, 23 janvier 2014
14. Pourquoi moi ?
Il y a trois jours, j'ai reçu le mail suivant :
" Bonjour,
Je suis étudiante en journalisme à l'EPJT de Tours et réalise un reportage vidéo sur la ville. Ce sujet a pour but d'illustrer Tours à travers des lieux, mais également des personnalités. Vous êtes la coauteur du très beau livre "L'âme du vieux Tours". Vous êtes également tourangelle de naissance et avez effectué plusieurs recherches sur la ville.
J'aurais souhaité vous rencontrer afin de faire votre portrait, connaître votre lien, votre histoire et votre vécu avec cette ville.
En attendant votre réponse et en vous remerciant de l'attention que vous accorderez à ma demande, cordialement
M.S "
J'eus d'abord l'intention de refuser poliment l'invitation, mais, la curiosité étant la plus forte, j'ai donc consenti à donner suite et mardi après midi j'ai reçu la visite de deux jeunes étudiants. Nous avons fait le point sur la façon dont ils envisageaient leur reportage. Nous allons donc nous revoir la semaine prochaine pour le tournage en partie chez moi et en partie dans la ville.
J'ai tout de même été un peu surprise que leur choix se porte sur ma personne car je suis loin d'être "une personnalité " ! J'ai ainsi appris que c'est Nicolas de chez Sutton qui leur a communiqué mon adresse mail ...
Cette expérience peut s'avérer intéressante, j'espère simplement que je serai à la hauteur des objectifs de ces deux jeunes !
Comme dit Prévert :
Pour faire le portrait d'un oiseau
Peindre d'abord une cage avec une porte ouverte
Peindre ensuite quelque chose de joli, quelque chose de beau, quelque chose de simple ...
Présentation de l'Ecole Publique de Journalisme... par JulieSicot
06:07 Publié dans Correspondance | Lien permanent | Commentaires (4)
dimanche, 29 décembre 2013
233. Période de guerre, épilogue
Le 6 juin 1944 les Américains débarquent en Normandie ; Nous le sûmes très vite par la rumeur. Mais le poste de TSF était brouillé. Toute la France était en effervescence, nous ne savions pas grand-chose et nous craignions la réaction des Allemands.
On voyait des avions chasseurs passer en rase-mottes ou bien très haut dans le ciel. La poudrière de Monts sauta. À l’école, une vitre explosa recouvrant les bureaux de morceaux de verre ; Les enfants eurent très peur.
Les Allemands déménagèrent leurs installations de cibles dans nos champs. Ils devenaient hargneux, ne voulaient pas entendre de radios chez les gens. Les journaux étaient toujours à leur avantage.
C’est dans cette tension extrême que se firent les moissons. Les chevaux avaient peur des tirs contre les avions.
Le 4 août 1944, fuyant l’avancée des alliés, tout un groupe d’hommes accompagnés de leurs femme et enfants s’installèrent à Luynes dans la salle des fêtes. Ils partirent de nuit quelques jours plus tard.
Nantes puis Angers sont libérés … Il n’y avait plus de courrier et les rumeurs les plus folles circulaient.
Le dimanche 13 août, le curé vient de terminer la messe, quand tout à coup les gens s’agitent :
— Il parait que les Américains sont là !
Effectivement, huit soldats dans une jeep se sont approchés de l’église. Ils pénétrèrent dans le café tenu par Mr et Mme Lenoble. Il y avait là deux soldats allemands. L’un veut se lever mais il est tué sur le coup, l’autre est fait prisonnier.
Les Allemands partent de nuit en convoi sur la levée de la Loire. Cela dura plusieurs jours de suite …
Le 18 août, les Américains s’installent dans la salle des fêtes pendant quelques jours ; Ils donnent du chocolat aux enfants. Puis ils prennent ensuite la direction de Tours.
La Nouvelle République parait le 2 septembre 1944. Enfin un journal non censuré !
Je rajoute –pour la petite histoire- que les conditions dans lesquelles ce journal vit le jour restent particulièrement troubles et ont fait l’objet d’une vive polémique ! Peut-être un jour saurons-nous la vérité …
J’avais dit à mes petits que leur papa allait bientôt revenir. Paris avait été libéré mais les troupes alliées étaient bloquées dans les Ardennes. L’hiver 44-45 me parut affreusement long !
En février 1945, Yolande eut sept ans et Jacques cinq ans et demi. En avril Yolande eut une coqueluche importante avec des spasmes jour et nuit durant trois semaines.
Un soir, alors que j’écoutais la radio, j’entendis :
— Le stalag VB est libéré par les Français !
Je renaissais … Mais il fallut encore attendre cinq semaines.
Les prisonniers arrivèrent petit à petit. À la gare de Tours, il y avait une affiche donnant l’adresse d’un restaurant ouvert de jour comme de nuit et où des chauffeurs volontaires attendaient les prisonniers pour les transporter en voiture jusqu’à leur domicile.
Enfin le 8 mai 1945 ce fut l’armistice !
Le 9 mai, alors que ma belle-mère trempait la soupe, que l’oncle lisait le journal, que mon beau-père était à la cave, que les enfants jouaient sur un tas de sable devant la buanderie où je préparai la salade, j’entendis soudain un grand coup de frein…
Je regardai par la fenêtre et vis une grosse voiture s’arrêter et des bras prendre une valise sur la galerie … Je sortis précipitamment, je ne sais plus si j’ai couru, toujours est-il que je me suis retrouvée dans les bras de mon mari qui me serrait très fort en disant :
— Je suis là, tu n’as pas changé.
J’étais tellement émue que je ne pouvais pas articuler un mot, ni même pleurer de joie. Il me tapotait le dos en me disant :
— Ça va passer.
Yolande était partie comme une flèche dire à sa grand-mère :
— C’est papa, maman pleure !
FIN
Voilà, j’arrête là ce récit. En juillet 1974, Roger accompagné de sa femme et de son ami Marcel qui avait été l’un de ses compagnons de détention, retourna en Allemagne pour montrer à sa famille le lieu où il avait vécu durant la guerre. Ils retrouvèrent les familles allemandes et furent reçus très chaleureusement.
Roger est mort en 1978. Yvonne est morte en 1996.
La semaine prochaine, j’irai voir leur fils, Jacques, et je lui rendrai les cahiers.
04:37 Publié dans Correspondance | Lien permanent | Commentaires (2)
samedi, 28 décembre 2013
232. Période de guerre -3-
À Luynes, la Kommandantur s’est installée 18 rue de la République. Je revois encore le drapeau avec la croix gammée flottant au balcon et les chefs très chics sur les marches, nous toisant d’un air narquois, tout en étant corrects.
Pendant ce temps je n’avais plus de lettres de mon mari. J’avais fait un rêve étrange où je le voyais au bord d’un gouffre. Moi, j’étais en face, lui criant : Viens ! mais il me faisait signe qu’il ne pouvait pas.
En moi-même j’étais sûre qu’il était vivant, mais très loin …
Le temps des fourrages et des moissons était arrivé. Les cousins et des voisins vinrent aider mon beau-père.
Un peu avant le 15 août je fis un nouveau rêve : j’entendais quelqu’un dans la nuit poser un sac à ma porte. Je me suis alors levée et j’ai ouvert la porte : mais il n’y avait pas de sac.
Le 16 août j’ai vu le facteur arriver en trombe avec un grand sourire et tenant une lettre de mon mari !
Il m’écrivait du stalag VB, me disant qu’il était prisonnier en Allemagne et que je devais par retour du courrier lui donner des nouvelles sur la feuille détachable. J’étais rassurée mais cela me fit un choc de le savoir prisonnier. Il avait été pris le le 10 juin à trois heures du matin et pendant quinze jours il avait marché à pied à travers la Belgique avec plein d’autres prisonniers. Il était ensuite arrivé à Villingen par le train.
Dans la même semaine je reçus une autre lettre, non cachetée. Je reconnus son écriture ; Il me disait qu’il faisait très chaud, que c’était très dur. Ils devaient marcher au pas par trois sur les routes, encadrés par les escorteurs allemands en vélo. Les Belges leur donnaient des bouteilles d’eau au passage et prenaient en cachette des Allemands les lettres à faire suivre.
Le cycle des saisons continuait malgré la guerre. L’hiver fut froid …
Les lettres se suivaient, il me disait qu’il était fatigué et qu’il avait été hospitalisé pour une forte crise de rhumatismes aigus. Sur une autre carte, il m’annonça qu’il avait eu des névralgies dentaires et qu’on lui avait arraché une douzaine de dents. De retour au camp, il avait été envoyé avec d’autres travailler sur les routes ou sur les lignes de chemin de fer détériorées par les bombardements. Je sentais son moral à zéro …
Quand nous eûmes le droit d’envoyer des colis, j’essayai de glisser une lettre écrite finement pour lui parler des enfants et de mon amour pour lui. Ses lettres devinrent plus toniques, il était heureux que je lui parle de la vie ici, mais il fallait prendre garde à la censure !
En 1941-42, les gens de Tours commencèrent à venir à la campagne pour se ravitailler en beurre, œufs, légumes. En retour ils nous apportaient du savon car nous en manquions.
Fin 41, Roger m’annonça qu’il était dans une ferme chez des cultivateurs, qu’il labourait avec deux vaches, que son patron était un charcutier réformé à la suite d’un accident. Il était nourri à la ferme et le soir il retrouvait 13 autres prisonniers logés dans un grand local gardé par un ancien militaire. C’est là qu’il se fit deux amis très chers ; Ils restèrent ensemble trois ans et demi.
J’ai souvent pleuré le soir quand je me retrouvais seule sans savoir quand je reverrais mon mari, mais j’étais tout de même rassurée de le savoir entouré d’amis. Dans nos lettres nous ne parlions jamais des hostilités.
À l’automne 41 nous eûmes des tickets de rationnement
Dans le journal on lisait que les Allemands gagnaient partout : les Balkans, la Hongrie, la Bulgarie et puis la Russie. L’hiver 41-42 fut très froid et néfaste pour l’avancée des Allemands.
Le 10 novembre 1942 les Allemands envahissent la zone libre. La résistance s’installe peu à peu. Mais il fallait se méfier, il y avait des collaborateurs et puis la milice.
J’avais des nouvelles par la femme d’un dentiste qui venait au ravitaillement toutes les semaines.
À Luynes d’inquiétantes rumeurs circulent à propos de disparitions de personnes juives.
Nous dormions très mal, les alliés venaient faire des raids et lâchaient des bombes soufflantes qui faisaient trembler portes et fenêtres. Je prenais alors mes enfants avec moi dans le lit.
À suivre
02:19 Publié dans Correspondance | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 26 décembre 2013
231. Période de guerre -2-
Dans l’après-midi du 18 juin 1940, alors que j’étais en train de faucher de la vesse en pleine floraison, j’entendis soudain des bruits de tirs venant du haut de la Tranchée, sur la route de Paris. J’écoutais le cœur battant ! La guerre arrivait, elle était là …
Parfois c’était le canon vers le pont Wilson et les mitrailleuses sur la route de Paris. Je courus à la maison prévenir mes beaux-parents qui sortirent pour écouter avec moi. Puis nous vîmes arriver des réfugiés belges tirant des charrettes pleines, avec femmes et enfants. Mon beau-père donna à boire à ces gens et à leurs chevaux fourbus. Les Belges nous dirent :
— Les Allemands sont partout, les avions mitraillent les réfugiés, ils nous suivent d’en haut.
Mon beau-père décida finalement de rester ; il y avait sa femme, sa mère de 87 ans qui était là, les petits enfants et tous les animaux. Et puis aller où ?
Par sécurité, mon beau-père voulut alors que nous allions dormir dans une cave située au Chêne Vert. L’endroit était sain et assez confortable. Nous nous sommes donc installés dans la paille et le foin avec des couvertures. Nous étions 14 au total.
Quelle nuit ! Jacques, qui avait 9 mois, prenait encore un biberon la nuit et il se mit à crier bien avant l’heure habituelle. J’ai dû ressortir pour aller faire chauffer le biberon dans une petite pièce attenant à la cave. Il m’a semblé entendre passer des vélos, puis il y eut des bruits de pas sur fond de mitrailles. Le jour se leva bientôt et nous regardâmes entre les barreaux de la porte de la cave. Eh oui, c’était bien les Allemands qui arrivaient à Luynes ; Ils parlaient entre eux et riaient avec des Ya, ya ! Après les chars arrivèrent. Nous étions sidérés et avions un peu peur. J’étais inquiète pour nos maris, nos frères, cousins et amis ; Où étaient-ils ? Pourquoi les Allemands étaient déjà là, à Luynes ? Je sentais une colère folle monter en moi …
Peu à peu les autres se réveillèrent. Il fallait aller à Champroux pour traire les vaches et rapporter de quoi manger. Je rassemblai tout mon courage et sortis. Quelques Allemands passèrent sans rien dire, ils avaient l’air exténué. Devant la croix du Chêne Vert, il y avait une grosse mitrailleuse à chenilles, le canon braqué vers la route qui remontait sur Panchien, et des soldats tout autour. Il fallait que je passe devant ! Je passai donc sans regarder, très droite. Arrivée à Champroux je dis à mon beau-père :
— Les Allemands sont au Chêne Vert et à Luynes.
Il prit alors son vélo en disant :
— Ce n’est pas croyable ! Je vais voir.
Je fis bouillir deux litres de lait que j’emportai ainsi que du café, du pain et du chocolat. La mitrailleuse était toujours là, braquée sur la route. C’était un défilé de chars fleuris de roses cueillies au passage, les soldats riaient, goguenards ! Je sentais mon sang bouillir.
Nous déjeunâmes dans la cave, puis, après avoir rangé la paille et replié les couvertures, chacun rentra chez soi.
Mon beau-père était revenu de Luynes, il nous raconta avoir vu des soldats sortir des machines à coudre par les fenêtres des maisons vides de leurs habitants. La charcuterie Vrillon fut pillée en un rien de temps, les épiceries également. Ils avaient faim !
La rumeur disait que Tours voulait se défendre et que la nuit qui arrivait serait rude.
En effet, d’un accord commun entre le préfet et le maire de Tours, les ponts furent dynamités vers 23 heures pour empêcher les Allemands de traverser la Loire. Les portes et fenêtres de la maison se mirent à trembler sous la détonation.
Le lendemain nous apprenions que le général de Gaulle avait lancé un appel pour les armées qui voudraient le rejoindre en Angleterre. Enfin quelqu’un voulait s’occuper de la France ! Nous avions ressenti un tel abandon de notre gouvernement et des armées. Cet appel me donna du courage et me consola.
Fin juin, le maréchal Pétain devint chef du gouvernement et demanda l’amnistie à l’Allemagne.
Quelques jours plus tard, en rentrant d’une visite à maman, j’entendis soudain un bruit infernal au-dessus des champs de blé. C’était des avions en rangs serrés … J’ai vu la croix gammée sous l’aile ; aux commandes deux pilotes riant à gorge déployée ! C’était fou !
Près du château les gens ont compté environ 25 avions en ligne, rasant les champs, les vignes, les routes, mais sans aucun tir. C’était une tactique pour impressionner. Deux avions ont même piqué sur Luynes et fait le tour du clocher. Jamais encore je n’avais eu aussi peur. Au passage de ce raid, un pêcheur à la ligne au bord de la Loire est mort d’une crise cardiaque. .. Un cheval est devenu fou.
Drôle de guerre : 9 mois d’attente, 45 jours de conflit, de pagaille, de panique, des batailles courageuses par endroits (comme à Saumur) pour finalement être occupés pendant cinq ans avec tout ce que cela comporte …
À suivre
Pour en savoir davantage :
12:30 Publié dans Correspondance | Lien permanent | Commentaires (1)